Le Suaire

Et si l'imposture était du 1er siècle . . .
Tête

L'analyse du radiocarbone qui en 1988 avait permis de dater le suaire du XIVè siècle vient en 2005 d'être remise en cause par le chimiste et sindonologue américain Raymond Rogers.

Ceux qui ont toujours essayé de se servir du suaire pour prouver la résurrection vont à nouveau avoir du grain à moudre mais, quand on reprend certaines de leurs théories pour les confronter non à la "parole d'évangiles" mais au contexte historique du 1er siècle, on aboutit à un scénario diamétralement opposé aux leurs. En effet, si la relique est bien contemporaine des évènements, il n'y a plus que deux alternatives : croire au miracle ou admettre la possibilité d'un faux du 1er siècle. Le constat n'est pas sans conséquence. L'explication la plus plausible serait en effet que le faussaire utilisa le cadavre de Jésus lui-même après qu'il eut été enlevé du tombeau pour fabriquer l'image sur le linge taché de son sang. C'est la seule hypothèse qui permettrait de tout expliquer de cet objet jusqu'ici réputé impossible. Le "saint" suaire pourrait alors devenir une preuve matérielle du contraire de ce qu'il est sensé démontrer.

Ce site a été créé en juillet 2005 

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Chapitre 1 Chapitre 2 Chapitre 3 Chapitre 4
Avant propos Les bases du scénario Contexte historique Hypothèses sur la fabrication

Menu principal


Chapitre 1

Avant propos
Le point de vue d'un sceptique
Naissance d'un scénario
Une double imposture ?

Chapitre 2

Les bases du scénario

Quelques liens
Matériel "sindonologique"
Thèses historiques
Partis pris techniques et scientifiques

Chapitre 3

Contexte historique
La mise au tombeau
Les gardes
L'enlèvement
Hypothèse des alliés de Jésus
Influences et alliances de Jésus
Les Esséniens
Fondation de la confrérie Essénienne
Le Maître de Justice
Jean Baptiste et son disciple
La dissidence
Être ou ne pas être ?
Les miracles
Le disciple que Jésus aimait
Une alliance d'intérêts communs
Le premier évangile en image
La passion
Jésus le Nazôréen roi des Juifs
Un autre plan
Trois éclaircissements possibles
Pourquoi le linceul ne fut-il pas utilisé politiquement ?
Et Judas ?
Chapitre 4

Hypothèses sur la fabrication

Une réaction de Maillard ?
Six anomalies inexplicables
Deux positions différentes du linge
Les traces de flagellation sur l'arrière des jambes
Pas de trace de pression sur l'arrière du corps
Les cheveux pendent verticalement
L'anomalie du crâne tronqué
Les leptons
La couche "d'impuretés"
Les repeints du sang
Une image un peu trop présentable
La justesse anatomique des traces de sang
La fluidité du sang

La fabrication de l'image
Le moule
Le problème des jambes
Les conditions pour que cet objet soit réalisable
Quatre propositions de réflexion

Trois techniques de moulage
Chauffage par pic thermique
Par chauffage interne
Les cheveux

Tout ce que pourrait expliquer mon hypothèse
Il reste peu de questions sans réponse
Voyons du côté de l'aragonite
Un savoir empirique
L'image dans son époque
Qu'est ce qui prouve que le faussaire vivait au 1er siècle ?

Résumé du dispositif en 10 points

En guise de conclusion


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Chapitre 1 Chapitre 2 Chapitre 3 Chapitre 4
Avant propos Les bases du scénario Contexte historique Hypothèses sur la fabrication


Avant propos

Le point de vue d'un sceptique : 

Les chrétiens sont depuis l'origine confrontés à un dilemme : la disparition du corps de Jésus est sensée prouver sa résurrection et donc sa présence. La multiplicité des reliques de contact qui envahit la chrétienté au moyen-âge montre bien le conflit intrinsèque d'une foi qui exige qu'on croit sans preuve et le désir païen et naturel de voir et de toucher l'image du dieu. Quand on consulte l'abondante parution et les nombreux sites consacrés au suaire, on trouve beaucoup plus d'informations dispensées par des croyants parfois prêts à tordre le cou au bon sens que d'informations réellement objectives. L'argumentaire souvent très riche des sindonologues* aboutit toujours à la même conclusion, à savoir que si la fabrication de la relique est inexplicable, c'est que son origine ne peut être que miraculeuse. Rien d'étonnant à cela me direz-vous puisqu'elle fut créée dans ce but. Certes, mais ce qui étonne et inquiète, c'est que de telles affirmations puissent encore se faire entendre dans la bouche de "scientifiques" du XXIème siècle comme si rien n'avait changé depuis 2000 ans.
Vous pouvez agrandir ce texte en combinant la touche Ctrl avec + ou avec la molette de votre souris Au-delà de la question de savoir si le St Suaire est bien le linceul de Jésus et s'il prouve ou non sa résurrection, il faut avant tout préciser qu'il s'agit d'une image fascinante tant sur le plan archéologique que technique et artistique. Si l'on veut s'approcher de la réalité historique de Jésus et de l'époque où il vivait, c'est moins dans les Évangiles qu'il faut chercher que dans des textes apocryphes ou extérieurs à la bible. S'il s'avère, comme certains essaient de nous en convaincre, que le st suaire possède un rapport direct avec Jésus, la réalité physique, historique et politique de cet homme pourrait alors se comprendre dans l'étude de cette relique. Que peut-elle donc nous apprendre si on l'interroge à travers les arguments des sindonologues mais sans partager leur foi en la résurrection ?

*Sindonologues : Scientifiques croyants qui étudient le linceul en essayant de lui faire prouver la résurrection. Traditionnellement opposés à ceux qui rejettent en bloc la relique qu'ils considèrent comme un faux du XIVè siècle.  

Naissance d'un scénario :

Au-delà de la fascination qu'exerça sur moi cette image quand je la découvris à la fin des années 70, je fus dès lors très intrigué par la question de savoir si l'homme était vraiment Jésus et comment l'image avait pu s'imprimer sur le linge. Les premiers livres que je lus sur le sujet étant tous écrits par des croyants qui ne pensaient qu'à prouver la résurrection me laissèrent sur ma faim et je me suis alors un peu désintéressé de la question.

L'analyse du carbone 14 qui en 88 data le linge du XIVè siècle réveilla mon intérêt. Cette datation inattendue soulevait de nouvelles questions d'ordre historique tout aussi insolubles que les précédentes : comment en effet un faussaire du moyen-âge avait-il pu fabriquer un tel objet ? Mais, là encore, déficit total de réponse. Puis cette datation suscita de plus en plus de controverses. Comme entre temps Internet avait envahi mon quotidien j'ai, comme vous, utilisé ce média pour me remettre un peu à jour. J'ai trouvé beaucoup de polémiques sur cette datation avant de découvrir la théorie du chimiste et "sindonologue" américain Raymond Rogers motrant que les prélèvements auraient été faits dans une zone restaurée au XVIème siècle et que la présence ou non de vanilline dans les fibres du tissu pouvait laisser penser que le linge était beaucoup plus vieux que ce qu'avait permis de déterminer le C14. J'ai aussi profité de cette recherche pour voir s'il existait de nouvelles théories sur la formation de l'image. Là encore Rogers, avec les impuretés du linge et la réaction de Maillard, me sembla avoir mis le doigt sur quelque chose d'intéressant. Le problème était que comme tous les autres, il tentait d'expliquer la formation de l'image d'une façon qui aboutissait à une impasse. En dehors des nouvelles théories que je découvrais en 2005, rien ne me sembla très différent de ce que j'avais déjà constaté en 78. Le petit monde de la "sindonologie" s'opposant aux "savants" n'envisageaient encore et toujours que deux alternatives qui chaque fois aboutissaient à des impasses : soit la relique est un faux du moyen-âge, soit c'est le vrai linceul de Jésus prouvant dans ce cas sa résurrection. Dans cette seconde mouvance on trouve aussi bien ceux qui, sous couvert scientifique, clament la disparition subite du corps dans un flash de neutrons . . . et ceux qui, comme Rogers, n'envisagent qu'un processus naturel pour expliquer le phénomène ; processus naturel qui, ne vous y trompez pas, par son caractère insolite et inexplicable, induit là encore une intervention de la providence.

Visiblement il n'y avait toujours personne pour envisager une troisième hypothèse qui partirait du principe que le linceul pouvait parfaitement être un faux du 1er siècle. Pourquoi cette réticence ? Est-ce que la lecture des Évangiles interdirait de penser que les contemporains de Jésus auraient pu trouver utile de fabriquer cette relique ? Certainement si l'on s'en tient strictement aux quatre textes bibliques. On sait pourtant aujourd'hui que la réalité historique de cette période était assez différente de ce que nous enseigne le nouveau testament. Et si les héritiers spirituels ou politiques de Jésus avaient eu à prouver sa mort par une preuve matérielle, pourquoi se seraient-ils contentés de dérober son corps ? Rien ne les empêchait de fabriquer cette preuve. Le linceul de Turin pouvait-il alors être à la fois vrai et faux ? Vrai linceul de Jésus parce que couvert de son sang et montrant sa véritable image mais totalement fabriquée à partir de son cadavre ? Pourquoi personne ne semblait y avoir pensé ou avoir envisagé cette possibilité alors que nos connaissances historiques et de nombreuses théories "sindonologiques" semblaient aller dans ce sens ? Peut-être parce que, vue sous cet angle, la relique pouvait amener à penser que le Christ n'avait pas pu ressusciter. Une hypothèse fort gênante en effet pour l'église et les chrétiens, une affirmation hautement sacrilège qui pouvait expliquer que personne, croyants ou non, ne s'y soit encore risqué.

Les réflexions et les idées se sont alors mises en place au fur et à mesure que je les mettaient par écrit. L'étude du suaire redevenait passionnante. Voilà que grâce aux théories des sindonologues replacées dans le contexte historique du 1er siècle, le linceul se mettait à démontrer le contraire de ce pourquoi il avait été fabriqué : non la résurrection mais l'encombrant cadavre de Jésus !

Je ne vois pas très bien pourquoi ni comment je pourrais nier en bloc l'existence historique de Jésus comme le font les "mythistes". Je préfère l'idée qu'un personnage historique, sorte de gourou politique et taumaturge, exista bel et bien à cette époque et qu'il fut tué par les romains. Pour le reste en effet les évangélistes et les Byzantins se chargèrent d'inventer le personnage du Christ. Si donc ce fut bien le cadavre de cet homme qu'utilisa le faussaire pour fabriquer la relique, l'invention du Jésus biblique commença bien avant l'écriture des premiers évangiles à travers l'image qui nous intéresse ici.

Chers lecteurs sachez donc avant de continuer que je ne suis ni scientifique ni croyant. Certaines thèses des sindonologues m'ont permis d'adopter un point de vue à partir duquel l'énigme du suaire m'est apparue explicable à condition d'admettre la simple humanité de Jésus. Mon objectif ne fut pas de prouver sa non résurrection pour provoquer ceux qui y croient. Chercher ce genre de preuves serait vain tant il est vrai qu'un homme de foi n'a pas besoin de preuves pour croire pas plus qu'un athée n'en n'a besoin pour ne pas croire. A un ami qui me disait que sa foi lui interdisait adhérer à mon scénario même s'il le trouvait très (trop !) convaincant, je répondis que si j'avais été croyant, j'aurais pu, à quelques détails près certes, élaborer le même scénario. Il ne sert à rien de chercher à démontrer une fois de plus que les grandes religions monothéistes sont fondées sur des croyances et des impostures. Il existe suffisamment de mystifications flagrantes et de montages théologiques évidents dans la bible pour que chacun puisse se faire une opinion sur ce sujet s'il le veut. Mon scénario sert uniquement à rappeler qu'il ne faut jamais confondre croyance et foi, crédulité et conviction, religiosité et sectarisme, spiritualité et rituel, théorie scientifique et orientation religieuse. Contrairement à tous ceux qui s'affrontent au sujet du suaire, qu'ils soient d'un bord ou de l'autre, vous constaterez tout au long de ces lignes que je ne prétends jamais détenir "LA" vérité. Ce qui m'a poussé à écrire ce texte est ma volonté de comprendre, non celle de croire ou de faire croire. Ce qui m'a décidé à le publier sur ce site, c'est mon désir de le soumettre à la sagacité de gens plus savants que moi-même.

Une double imposture ? :

Certains chrétiens qui militent pour la validité de la datation radiocarbone de 1988 auraient-ils perçu le risque religieux que représente le "St-Suaire" ? En effet, si la relique est bien du 1er siècle, un croyant voulant défendre sa foi n'aurait d'autre choix que de montrer qu'elle prouve la résurrection ou qu'il s'agit d'un faux moyenâgeux. Si l'on parvient à démontrer que le suaire est bien du 1er siècle et qu'on confronte cette réalité aux théories "sindonologiques" en les replaçant dans le contexte historique de l'époque (sans miracle) on aboutit alors inévitablement à l'idée d'un faux antique, c'est-à-dire à mon scénario suggérant l'action d'un faussaire qui utilisa le linceul et le cadavre de Jésus pour créer l'image. Si l'imposture du XIVè siècle est sans conséquence, la double imposture d'un faux antique prouvant l'impossibilité de la résurrection saperait purement et simplement le fondement même du christianisme. On comprend mieux dans ces conditions que certains hauts dignitaires de l'église et certains scientifiques croyants (comme Rogers avant qu'il soit obligé d'admettre la théorie du patch moyenâgeux) se soient rangés du côté des pro C14 et autres détracteurs de l'authenticité. Ainsi les "anti-suaires" ne comptent pas dans leurs rangs que des non chrétiens, des athées, des agnostiques ou des sceptiques mais aussi des chrétiens "pragmatiques" conscients du danger que cette relique fait peser sur le fond de commerce de l'institution religieuse qu'ils vénèrent ou qu'ils servent ! Ainsi a-t-on vu récemment le Vatican s'en remettre à la science pour déclarer officiellement le suaire "œuvre artistique faite de main d'homme au moyen-âge". On comprendrait aussi pourquoi ces mêmes autorités religieuses freinent depuis toujours des quatre fers quand il s'agit d'autoriser de nouvelles expertises. Finalement, tout ce petit monde se serait beaucoup mieux porté si le suaire avait brûlé dans l'incendie de 1532 ou dans celui de 1997 et si personne n'avait remis en cause la datation radiocarbone ou redécouvert les manuscrits de la mer morte. Nul doute que ce scénario est de nature à poser de sérieux problèmes à tout chrétien conscient de la possibilité de cette double imposture sur laquelle se fonde le christianisme. Il serait paradoxal que cette religion qui combattit sans relâche l'idolâtrie des peuples de l'antiquité se retrouve victime 2000 ans plus tard de sa toute première icône.

N'étant pas chimiste, je n'ai pas réussi à reproduire le processus de jaunissement de l'image à partir des théories de Rogers mais je pense maintenant que ce n'est pas l'essentiel [voir note]. Ce qui au final importe pour moi c'est d'avoir pu cerner le contexte historique et les conditions de fabrication de la relique en m'appuyant sur certaines affirmations des sindonologues comme présupposé de départ. Les techniques que je propose au chapitre 4 sont compatibles avec le 1er siècle et je pense avoir démontré que les motivations pour fabriquer cette image ne furent jamais aussi grandes qu'après la mort du personnage historique qui inspira Jésus. Enfin, il n'y a qu'au 1er siècle qu'un faussaire avait la possibilité de connaître certaines choses propres à cette époque et c'est même parce qu'il destinait cette pièce à conviction à un public qui avait connu Jésus qu'il était obligé d'introduire cette justesse. Mon scénario ne manquera pas, j'imagine, de rendre hystérique quelques bigots exaltés ou quelques adeptes de la "parole d'évangile". Je souhaite seulement qu'il soit un jour confirmé ou invalidé par des historiens et des scientifiques qui pourront répondre notamment aux questions que je pose à la fin de ce texte. J'ai voulu montrer que les arguments des sindonologues peuvent fort bien mener au contraire de ce qu'ils défendent pourvu qu'on confronte leurs théories non aux évangiles mais à la réalité historique du 1er siècle. L'historien amateur que je suis a pu mal interpréter certaines informations ou prendre pour justes des hypothèses fausses mais si je l'ai fait c'est en toute bonne foi. Je n'ai rien à vendre ni à prouver, j'ai juste voulu comprendre un mystère que personne ne semble avoir pour l'instant envisagé sous cet angle. Ce scénario s'est imposé de lui même quand les théories de Rogers m'ont tout à coup permis de faire le lien entre mes connaissances. J'ai alors mis mes réflexions par écrit pour moi-même afin de les affiner et plus j'ai écrit plus l'ensemble est devenu cohérent. Le problème est que j'ai travaillé avec le matériel théorique, scientifique et historique des autres et que je suis maintenant bloqué n'ayant ni le temps ni la possibilité d'aller plus loin dans ma recherche. C'est pour cette raison que j'ai mis mes réflexions sur Internet en espérant qu'elles intéressent des chercheurs qui, comme moi, sont excédés par les affirmations de certains sindonologues et ne croient pas non plus que le suaire soit du XIVè siècle. Je suis curieux des critiques (constructives cela va de soi !) que certains pourront m'apporter là où je me serais trompé et j'attends un contre-scénario qui invaliderait le mien en expliquant tout de la relique.  



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Chapitre 1 Chapitre 2 Chapitre 3 Chapitre 4
Avant propos Les bases du scénario Contexte historique Hypothèses sur la fabrication


Les bases du scénario 

Quelques liens

  Matériel "sindonologique"  

Thèses historiques
Partis pris techniques et scientifiques

Avant d'aborder mon développement


La lecture de ce texte requiert des prérequis indispensables. Mon développement doit être abordé comme une enquête dont les preuves, les indices ou certaines hypothèses sont sensés être déjà connus du lecteur. Si donc vous n'êtes pas un solide connaisseur du Suaire, ne vous lancez pas directement dans cette lecture. Faites-vous d'abord une opinion en parcourant le résumé et en lisant attentivement les trois paragraphes de ce chapitre ainsi que les sites que j'ai mis en lien ci-dessous.

Quelques liens


Sites "sindonologiques" : (chrétiens, défendant la résurrection et l'authenticité du linceul)

Pour une première approche :

http://www.ldi5.com/sindo/sindhist.php : Une histoire détaillée du linceul du 1er siècle à nos jours
http://www.ldi5.com/sindo/sinddes.php : Une rapide description du linceul sur le même site. Idéale pour une première approche succincte.
http://ebior.org/Encyc/Resurrection/linceul.htm : Site offrant une grande quantité d'informations. Idéal pour une première approche détaillée.
http://www.sitedemarie.com/shroud98.html : Pour les adeptes de théories à base de neutrons et de corps qui se désintègre dans un éclair aveuglant.

Pour une approche plus approfondie :

http://perso.wanadoo.fr/gira.cadouarn/france/index_fr.htm: Site écrit par un médecin avec notamment une étude des sévices subits par Jésus et une autre sur les coulures de sang du front par rapport à leur positionnement sur le linge. Ce site est très intéressant à condition d'éviter le mysticisme délirant des dernières pages.
http://www.shroud.com/ : Site de référence pour tous les sindonologues (en anglais)

http://www.suaire-science.com/ : Site très détaillé et très bien fait résumant en Français le site ci-dessus. Il vaut mieux avoir visité les liens précédents avant de s'y attaquer car il requiert lui aussi certains prérequis. C'est mon site de référence où vous trouverez notamment les théories de Rogers sur la zone de prélèvement restaurée au XVIè siècle, sur la datation à la vanilline et sur la réaction de Maillard. Il est indispensable de le consulter pour bien comprendre mon développement. Cela ne signifie pas que je partage toutes les thèses qu'il développe et encore moins que son auteur serait d'accord avec les miennes ! Un échange par courriel entre lui et moi est disponible ICI

Sites sceptiques : (ils sont beaucoup moins nombreux et, du moins dans ces exemples, pas toujours plus objectifs)

http://www.rotilom.com/linceul/conclusions.htm  : Le suaire est un faux du moyen-âge et toute autre avis est nul et non avenu.
http://www.zetetique.ldh.org/: Site relativement influant malgré les déclarations approximatives et péremptoires qu'on y trouve sur le suaire. C'est notamment là qu'on peut lire les théories "mythistes" et pro C14 de P.E. Blanrue qui, avec le magazine Science et Vie, s'est quelque peu discrédité en juillet 2005 avec une expérience sensée révéler la recette du suaire. Un démenti remarquable à cette expérience est disponible ICI 
http://www.skeptic.ws/ : Le site "officiel" des "sceptiques" (en anglais)
http://www.freeinquiry.com/skeptic/shroud/as/schafersman.html (en anglais)

Études scientifiques :

http://carbon14.univ-lyon1.fr/ : Tout sur le C14 et démonstration que les analyses de 1988 ont été bien faites.
http://xoomer.virgilio.it/misalcit/P.%20FRANCESE%20con%20foto.htm : Étude minutieuse des taches d'eau et de brûlures du suaire renforçant la thèse selon laquelle le linceul et le voile d'Édesse pourraient être un seul et même objet.

Textes antiques non chrétiens parlant de Jésus et du christianisme :

http://www.dammarilys.com/comm/adelfoi.html :  Textes (controversés) de Flavius Josèphe faisant allusion à Jésus.
http://www.1000questions.net/fr/chroniq/flavius.html : Textes tout aussi controversés de Flavius Josèphe parlant du "Thaumaturge".
http://www.ebior.org/Vie-de-Jesus/celse.htm :  Extraits de la critique du christianisme de Celse, philosophe Romain du IIème siècle.

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Il est indispensable de prendre connaissance des thèses qui suivent pour bien comprendre ma démarche.

Matériel "sindonologique"



Les thèses présentées ci-dessous ont toutes été avancées par des "sindonologues". Elles sont connues et ont fait l'objet de publications dans des revues scientifiques. Bien que mon point de vue soit celui d'un athée, j'ai pris en compte tous ces paramètres pour élaborer mon scénario que j'ai développé, non par rapport aux évangiles ou à la barrière du carbone 14 mais en me fondant sur la réalité historique du 1er siècle. 

Pour bien comprendre ces thèses, il faut visiter les sites en lien ci-dessus et surtout http://www.suaire-science.com/ qui vous apprendra tout sur les théories de Rogers également disponibles pour les anglophones sur http://www.shroud.com/.

Ces affirmations sindonologiques (en italique bleu) sont prolongées de commentaires personnels pour qu'il soit bien clair que mon choix de les utiliser obéit à une démarche critique et non à une quelconque approbation idéologique.

  •  L'image n'est pas une peinture. Je le pense aussi.
  •  L'image n'est pas une photographie. C'est évident.
  • Le parcours historique de la relique commence par l'apparition à Édesse du voile d'Abgar vers l'an 30 avec sa disparition en 55 et sa redécouverte en 525 dans une muraille de la ville. C'est une belle histoire qui apporte beaucoup d'eau à mon moulin mais quant à savoir si c'est autre chose qu'une légende . . . La "découverte" du linge dans une niche de la muraille d'Édesse est certainement vraie mais la réparation des remparts ayant duré plusieurs années, les autorités religieuses auraient eu largement le temps de fabriquer un faux suaire et de prévoir comment il serait "redécouvert".
  • Certaines auréoles d'eau présentes à la surface du linge ont récemment donné lieu à une théorie semblant confirmer la thèse de l'enfermement du linge dans une amphore. Cette observation permettrait d'établir un lien avec la légende du linge d'Édesse. Passionnant bien que très hypothétique [voir ce site]
  • Le Mandylion et le suaire ne faisaient qu'un ou le Mandylion était une copie du suaire qui, lui, était conservé bien à l'abri des fidèles et montré aux seules autorités politiques et religieuses ainsi qu'aux artistes. Sans doute mais cela n'exclut pas que le dit suaire puisse avoir été fabriqué par les Byzantins ou par les "Édessiens" au VIè siècle.
  • Baruch et Danin confirmèrent en 1998 les observations controversées de Frei en identifiant une quantité élevée de pollens notamment de gundelia tournefortii. L'analyse a également montré la présence de pollen de câprier. Les deux espèces ne coexistent dans le monde que dans une zone limitée aux abords de Jérusalem. On peut également voir une empreinte de gundelia tournefortii sur le suaire, près de l'épaule de l'homme. Certains experts ont suggéré que cette plante épineuse avait pu être utilisée pour la "couronne d'épines" (Voir ICI). Ces traces de pollens endémiques retrouvés récemment semblent en effet attester de la présence du suaire dans cette région ainsi qu'en Turquie, en Suisse et en France. C'est un argument très intéressant et, bien qu'il ne prouve pas l'âge ou "l'authenticité" de la relique, c'est une donnée de première importance qui laisse penser que le linge se trouva effectivement dans tous les lieux où séjourna le Mandylion/Suaire.
  • Le Codex Pray datant de la fin du XIIè siècle contient une enluminure montrant un linceul avec des détails caractéristiques de l'actuel suaire de Turin. Ce document prouve à lui seul que la datation de 1988 est fausse. Je pense effectivement qu'il s'agit là d'un argument non négligeable contre la datation radiocarbone même s'il ne prouve en rien l'origine antique du suaire.
  • Plusieurs sources parlent d'un suaire ou sydoine ou synne ou soudarion à Constantinople avant et pendant le sac de 1204 :
    • Vers 1090, l'empereur byzantin Alexis Ier Comnène demande de l'aide pour la protection des reliques conservées à Constantinople dont "les linges retrouvés dans la tombe après la résurrection".
    • En 1147, le roi de France Louis VII vénère le Linceul à Constantinople dans l'église Sainte-Marie des Blachernes, avant de poursuivre sa route vers Jérusalem.
    • En 1150, une délégation hongroise vient à Constantinople pour négocier un mariage royal entre les deux états. La délégation en profite pour contempler le Mandylion déployé. C’est peut-être à cette occasion qu’un artiste hongrois pourra observer le linceul et le gardera en mémoire pour dessiner quelques temps plus tard l'enluminure du Codex Pray évoquée ci-dessus.
    • Entre 1151 et 1154, le moine bénédictin Nicolas Soemundarson se recueille à Constantinople devant "les bandeaux de lin, avec le soudarion et le sang du Christ".
    • En 1171, Amaury Ier, roi de Jérusalem, voit à Constantinople "le drap que l'on appelle synne où le Christ fut enveloppé".
    • En 1201, le gardien des reliques de l'église Sainte-Marie du Phare, Nicolas Mésaritès, évoque "les linges sépulcraux du Christ qui bravent la corruption parce qu'ils ont enveloppé l'ineffable mort, nu et embaumé après la passion".
    • Le 12 avril 1204, le chevalier Robert de Clary rapporte avoir vu à l'église Sainte-Marie des Blachernes "le Sydoine où Notre Sire fut enveloppé".
  •  Le suaire fut dérobé par les croisés pendant le sac de Constantinople en 1204. Ils ont volé toutes les reliques, pourquoi pas celle-ci ?
  • Le suaire est signalé à Athènes en possession de Villehardouin deux ans après le sac de Constantinople. C'est cohérent
  • Il devient la propriété de Geoffroy de Charny vers 1330 grâce à son épouse Jeanne de Vergy qui l'avait hérité de son arrière grand-père Othon de la Roche. C'est l'explication la moins romanesque et la plus plausible.
  • Le "Mémorandum d'Arcis" est une cabale montée de toute pièce pour discréditer des ostensions de Lirey qui ne rapportaient rien à l'évêque de Troyes. Les accusations de ce document de seconde main paraissent en effet bien légères et si l'Évêque découvrit le faussaire, pourquoi ne révéla-t-il jamais son identité ?
  • L'image n'est pas issue d'un bas-relief car sa justesse anatomique est trop parfaite. Je partage ce point de vue si l'on parle d'un bas relief sculpté.
  • L'image ne peut provenir que d'un véritable cadavre de crucifié. Si on adopte l'hypothèse ci-dessus celle-ci semble en découler inévitablement. Cependant elle n'exclue pas l'utilisation d'un moulage sur nature et c'est la thèse que je défends dans mon scénario quelle que soit d'ailleurs l'époque de la fabrication.
  • Les coulures de sang sont anatomiquement parfaites. Ce fait semble incontesté mais ce qui me gêne personnellement c'est leur non moins grande perfection graphique et leur absolue propreté.
  • Le sang est bien du sang humain. Affirmation controversée à cause de sa couleur trop rouge. Alors que certains n'y voient que de la peinture, d'autres identifient formellement du sang humain de rhésus AB que certains rêvent même de cloner pour précipiter artificiellement le retour du Messie ! Personnellement je ne vois pas pourquoi ces traces anatomiquement justes ne seraient pas le sang du crucifié qui fut enveloppé dans le linge mais cela ne me dérange pas d'imaginer qu'on agrémenta ces taches d'un peu de rouge soit au moment des retouches faites par le faussaire, soit beaucoup plus tard afin de raviver la relique.
  • Toutes les taches de sang du linceul proviennent du même homme car toutes sont du rhésus AB. Ce rhésus rare se retrouvant également sur le suaire d'Oviedo suggère que les deux linges ont de grandes chances d'avoir enveloppé le même corps. Si la tunique d'Argenteuil pouvait elle aussi montrer ce rhésus, ce serait quasiment la preuve de l'autenticité des trois reliques. Non seulement cela ne prouverait rien mais c'est le genre d'argument qui exploite une simple similitude pour en faire une preuve en ignorant une réalité scientifique reconnue : tout sang ancien évolue vers le rhésus AB ! Quant à la tunique d'Argenteuil, elle vient d'être datée du VIè siècle (époque, rappelons-le, où fut "redécouvert" le Mandylion dans la muraille d'Édesse). Affaire à suivre . . .
  • La présence de bilirubine dans le sang du suaire montre qu'il vient d'un homme ayant beaucoup souffert. De plus cette bilirubine pourrait expliquer la rougeur anormale des taches. Je ne suis ni chimiste ni médecin, je n'ai donc pas d'avis technique sur cette question. Je sais juste que cet argument, s'il est fondé, suggère que le faussaire travailla à partir d'un vrai supplicié, ce que n'aurait sûrement pas fait un faussaire du XIVè siècle.
  • L'oxyde de fer n'est présent sur le linge qu'à l'état de trace et provient essentiellement de la dégradation du sang. C'est un point essentiel pour contredire l'hypothèse de la peinture et celle du tamponnage à l'oxyde de fer sur bas-relief remise à la mode en 2005
  • L'image ne s'est pas formée sous les taches de sang. Du moins sous celles qu'on a examiné.
  • Le fouet utilisé pour flageller l'homme du suaire est un flagrum romain. Ce "gros martinet" garni de balles de plomb qui servait à châtier les soldats étant oublié depuis très longtemps au XIVè siècle, il est exclu qu'un faussaire moyenâgeux ait pu penser à en reproduire les traces caractéristiques. Cet argument est très convaincant. Certains ont fait remarquer que les pénitents du moyen-âge se flagellaient avec des lanières à nœud qui pouvaient laisser des traces proches d'un flagrum. On peut néanmoins se demander pourquoi un faussaire du XIVè siècle aurait choisi de montrer de telles traces alors que les évangiles parlent d'une flagellation avec des verges ? Personnellement cet argument me semble consolider très sérieusement l'hypothèse d'un suaire d'origine antique fabriqué par et pour les contemporains des événements.
  • Les clous furent enfoncés dans les poignets et non dans les paumes. C'est techniquement juste mais un faussaire du moyen-âge n'aurait jamais pensé à cela ni oser le faire. Très convaincant. Si les chrétiens ne crucifiaient plus personne depuis le VIè siècle, les musulmans, eux, pratiquaient toujours ce suplice et les croisés avaient pu observer des crucifiés. Il n'en reste pas moins que si le faussaire du 1er siècle aurait à coup sur placé le clou dans le poignet, son homologue du moyen-âge, même ancien croisé, se serait probablement conformé aux évangiles et à la tradition pour satisfaire l'attente de l'église et de ses contemporains.
  • Le tissage en chevron existait au 1er siècle. Cela semble avéré.
  • La couture de la petite bande latérale est très particulière. Aucun exemple de cette technique n'est connu des spécialistes au moyen-âge mais on en a retrouvé une trace archéologique datant du 1er siècle lors de fouilles dans la forteresse de Massada non loin de Jérusalem. Troublant et fort intéressant.
  • Le lin du suaire a été blanchi avant tissage. Cette pratique est caractéristique de l'antiquité. Pline le confirme.
  • Au moyen-âge, les tissus étaient toujours blanchis après tissage. Certains spécialistes l'affirment.
  • Les taches de sang se sont formées sur le linge en épousant les reliefs du corps. C'est incontestable.
  • L'image présente des caractéristiques uniques de tridimensionnalité. Ce fait est avéré.
  • L'image est non distordue comme projetée orthogonalement sur le linge plan. C'est certain.
  • Cette orthogonalité interdit d'envisager une formation par rayonnement thermique à partir d'une statue (ou d'un corps . . .). Les rayons de chaleur par définition rayonnent à partir d'un point central c'est-à-dire qu'ils ne se déplacent pas parallèlement les uns aux autres. Seul un système optique permet la focalisation mais un tel dispositif n'existait pas dans l'antiquité et, bien que les lentilles étaient inventées au XIVè siècle, elles ne servaient alors qu'à corriger la vue et non à projeter des images et encore moins de la chaleur.
  • Ce ne sont ni des pigments ni une brûlure ni une déshydratation des fibres de cellulose qui forment l'image mais de la mélanoïdine déposée très superficiellement sur les fibres de surface. Une des hypothèses de Rogers sur lesquelles j'ai choisi de m'appuyer.
  • Cette mélanoïdine serait issue d'une réaction de Maillard entre une couche d'impuretés superficielles et des émanations d'amines à l'état gazeux provenant du corps. Provenant du corps . . . selon Rogers qui imagina cette possibilité pour expliquer la formation de l'image par un phénomène naturel. Une piste absurde selon moi que je décortique plus bas et qui a largement motivé l'écriture de mon scénario.
  • L'image ne pénètre pas dans le linge. Incontesté
  • Une seconde image très floue et invisible à l'œil nu vient d'être découverte sur l'autre face du linge. Cette découverte récente déjà nommée "double superficialité" semble confirmer la nature gazeuse de ce qui a provoqué le brunissement.
  • Les quatre bandes prélevées dans l'échantillon radiocarbone de 1988 ont toutes donné des âges différents dans une fourchette de 130 ans allant de 1260 à 1390. Un tel écart de datation est beaucoup trop étendu pour la technique du carbone 14 ordinairement beaucoup plus précise. Cette anomalie inexplicable jette à elle seule un doute sur la date du début du XIVè siècle avancée par les trois laboratoires. C'est en effet une bizarrerie qui a fait dire à certains que les analyses furent mal faites mais je ne le crois pas. D'autres ont avancé que le linge aurait pu se "recharger" en radioactivité lors de l'incendie de 1532 ou mieux à cause de la résurrection dans un grand "flash" de neutrons . . . sans commentaire !!!
  • L'échantillon radiocarbone fut malencontreusement prélevé dans une zone restaurée au XVIè siècle. Cette autre théorie défendue par Rogers mais émise par Benson et Marino, pourrait effectivement fournir une explication plausible aux écarts de datation.
  • La datation par la vanilline des fibres de lin effectuée par Rogers remet en cause celle au C14 de 1988. Contesté et contestable sur plus d'un point, cette théorie n'en reste pas moins très intéressante. Elle est, avec son hypothèse absurde de la formation de l'image par un phénomène naturelle, et l'affirmation du père Paul de Gail décrite ci-dessous, l'un des trois déclencheurs de mon scénario. 
  • En associant la plupart des paramètres décrits ci-dessus avec le traitement particulier subi par l'homme du suaire : flagellation au flagrum, couronnement d'épines, crucifixion avec des clous, mort prématurée, coup de lance au côté, mise au tombeau dans un linceul, il faut en déduire que ce dernier ne peut être que Jésus. Si les évangiles sont bien le reflet de la parole divine, l'apparition de l'image est forcément miraculeuse : Le St-Suaire prouve donc la résurrection et la nature divine du Christ . . . Le père Paul de Gail dans les années 70 déclarait ceci : "Il est extrêmement probable que le Suaire de Turin soit celui qui enveloppa le corps du Christ et, selon mes calculs, la probabilité qu'il ne le soit pas est de 1 sur 225 milliards". Ceci est l'un des principaux arguments des sindonologues et l'assurance avec laquelle ils le resservent à toute occasion montre à quel point la rigueur scientifique n'est pas le problème de ces gens. Dont acte : si l'on admet que cette probabilité est juste mais qu'on rejette l'idée du miracle, le faux du 1er siècle devient la seule explication possible avec les conséquences que cela implique. Le mal que se donnent ces scientifiques aveuglés par la foi pour prouver la résurrection de leur dieu pourrait bien alors aboutir à la démonstration du contraire de ce qu'ils croient. C'est ce que je tente de démontrer dans mon scénario.

Thèses historiques



Là encore je m'appuie sur des connaissances et des hypothèses défendues par des scientifiques et des historiens qui, cette fois, ne sont plus motivés par leur croyances mais s'appuient sur des données rationnelles.

- Je suis parti du principe que les circonstances de l'apparition du linceul étaient "rationnelles". Le 1er siècle n'était pas un monde différent du nôtre : pas de miracles, pas de fils de dieu, pas d'intervention divine pour changer le cours des choses. Les comportements des hommes (y compris ceux de Jésus) étaient déterminés par les circonstances, leur psychologie, leurs ambitions, leurs croyances et non par la volonté de Dieu.

- La fabrication du linceul se fit avec des techniques compatibles avec ce qui était envisageable au 1er siècle et probablement à partir de connaissances empiriques.

- Je suis parti du principe que les évangiles ne sont pas une source fiable. Cette remarque ne manquera pas de faire sourire les sceptiques et les historiens qui me prendront pour un naïf mais j'ai cru bon de préciser ce point après que des lecteurs "croyants" de mon site m'aient reproché de fonder mes hypothèses sur des faits que les évangiles ne confirmaient pas (voir cet échange). C'est donc pour ceux qui prennent les évangiles pour "parole d'évangiles" que j'ai jugé bon de préciser ce point.

- Je ne suis pas d'accord avec le point de vue des "mythistes" qui affirment que Jésus est une pure invention des premiers chrétiens. Je pense que le "Christ" fut inventé à partir d'un personnage historique bien réel. Je partage le point de vue des historiens qui décrivent cet homme comme un leader politico-religieux formé à l'école essénienne (Revoir à ce propos l'excellente émission "Corpus Christie"). Tout d'abord disciple de Jean le Baptiste, il lui succéda en adoptant d'autres méthodes de "communication". Abandonnant le baptême il choisit de prêcher en reprenant les croyances millénaristes et la rhétorique des esséniens tout en façonnant son image prophétique par des miracles aussi "médiatiques" que fabriqués. Il était pour cela épaulé par un réseau de sympathisants dont certains occupaient les plus hautes places de la société. Les disciples de cet homme n'avaient pas grand chose à voir avec les apôtres de la bible. Ceux que les romains appelaient les "Nazôréens" et dont "Jésus" était visiblement le leader avaient pour but de conquérir le pouvoir en renversant Hérode et son système politico-religieux considéré comme corrompu et illégitime. Pour conquérir le trône "Jésus" prétendait descendre de David et comptait s'appuyer sur un vaste soulèvement populaire. Ce ne sont pas ses blasphèmes qui provoquèrent sa condamnation mais son activisme politique et sa revendication royale qui inquiétèrent les autorités juives. Craignant un soulèvement populaire ils demandèrent aux romains d'arrêter "Jésus" et de le tuer. Après la mort de leur chef ses sympathisant tentèrent de poursuivre la lutte mais les persécutions commencèrent rapidement notamment contre les membres les plus politiques du mouvement. Seuls purent s'en sortir les adeptes religieux qui, rejetés par les Juifs et après la guerre de 70, tentèrent avec un incroyable succès de s'intégrer au monde romanisé avec lequel il fallait désormais compter.

- J'ai considéré que les grands miracles de Jésus décrits dans les évangiles avaient un fond de vérité. Rien ne prouve en effet que la transformation de l'eau en vin, la multiplication des pains et la résurrection de Lazare ne furent pas une invention pure et simple des évangélistes. Simplement, je suis parti du principe que ces événements avaient eu lieu parce qu'il m'était possible de les expliquer et de me servir de cette thèse pour expliquer la fabrication du linceul.


 Partis pris techniques et scientifiques



- Je pense que la tridimensionnalité et la propriété de négatif photographique de l'image du linceul ne font que découler fortuitement de la technique employée par le faussaire. La présence de ces caractéristiques sur le linge n'implique nullement qu'il en fut l'inventeur conscient.

- Je me suis fortement appuyé sur la théorie du chimiste américain R. Rogers qui explique le jaunissement superficiel des fibre formant l'image par une réaction de Maillard. Une "déshydratation oxydative" d'une couche très fine d'impuretés composées d'hydrates de carbone qui polymérisent au contact d'une source de chaleur et/ou d'amines pour former de la Mélanoïdine, sorte de caramélisation des sucres donnant une coloration brune et indélébile. 
(Voir : http://www.suaire-science.com/form_image.htm Profitez de la page sur laquelle vous tomberez qui traite de "la formation de l'image" pour vous faire une idée sur certaines théories cocasses actuellement en vogue à ce sujet)

- Là où je ne suis plus du tout d'accord avec Rogers c'est quand il s'obstine à déclarer, malgré les impasses évidentes, que le phénomène doit nécessairement avoir une explication naturelle. Sans doute avait-il parfaitement compris qu'admettre la possibilité d'un faux antique impliquait presque nécessairement que ce soit le cadavre de Jésus lui-même qui ait pu être utilisé.

- Je suis très intrigué de savoir si Rogers avait raison de croire que la zone de prélèvement des échantillons pour la datation fut malencontreusement choisie à l'emplacement d'une restauration invisible du 16ème siècle. La datation qu'il proposa juste avant sa disparition en se fondant sur l'absence de vanilline dans les fibres du suaire alors qu'il y en avait toujours dans les échantillons de la zone de prélèvement, bien que très controversée, permet malgrè tout d'envisager de nouveau la possible origine antique du linceul. Si donc le linge est bien du Ier siècle il ne reste plus que trois possibilités : soit la formation de l'image est miraculeuse et Jésus était bien le Messie, soit Rogers avait raison de penser que cette formation pouvait être naturelle, soit enfin mon scénario est le seul qui jusqu'ici permettrait d'expliquer ce qui s'est réellement passé avec ce que cela implique pour la résurrection à laquelle plus personne ne pourrait croire.



Voilà pour mes bases de réflexion et qu'on ne vienne pas me reparler de l'invention la photographie au XIVè siècle ou de la disparition du corps dans un dégagement de neutrons, de la "shadow theory" ou de l'oxyde de fer. Toutes ces théories ignorent allègrement la plupart des caractéristiques fondamentales du linceul ainsi que la réalité historique et scientifique de l'époque où il fut créé.

La fabrication du suaire doit pouvoir s'expliquer simplement par des techniques existant au 1er siècle ne violant en rien les lois de la physique et sans négliger la moindre de ses particularités. Si l'on ne se fonde pas sur ces bases rationnelles, on se fourvoie.






Chapitre 1 Chapitre 2 Chapitre 3 Chapitre 4
Avant propos Les bases du scénario Contexte historique Hypothèses sur la fabrication


Contexte historique


 

 

La mise au tombeau : 

Jésus est crucifié un vendredi de l'an 30, veille du sabbat, (je dirai schabbat car c'est ainsi qu'il convient de prononcer le nom de cette tradition Juive) qui, cette année-là, coïncide avec la Pâque. Le schabbat va commencer dès l'apparition de la première étoile et il n'est pas question de laisser des corps de crucifiés exposés à la vue de tous pendant cette trêve sacrée. Les gardes romains reçoivent l'ordre d'accélérer la mort des trois suppliciés en leur brisant les jambes. Mais Jésus est déjà mort. Un des soldats lui transperce alors le cœur de sa lance par le flanc droit. Du sang et de "l'eau" (sérum et liquide contenus dans les poumons) s'en écoulent, signe d'une mort intervenue probablement par étouffement depuis déjà plusieurs heures. Le corps de Jésus est détaché et on l'emporte vers le tombeau tout proche. Ce tombeau, qui n'a jamais servi, appartient à Joseph d'Arimathie qui venait de le faire creuser pour son propre usage. Joseph d'Arimathie est un riche notable qui a pris parti pour Jésus bien qu'il soit membre du Sanhédrin. C'est aussi lui qui demande à Pilate l'autorisation de récupérer la dépouille de Jésus pour la mettre dans un tombeau, et c'est encore lui qui fournit le linceul. Il faut faire vite car le schabbat va bientôt commencer et il n'est pas question pour un juif d'effectuer un quelconque travail et encore moins de se souiller au contact d'un cadavre pendant ce rituel hebdomadaire. On installe le corps dans le linceul et on roule provisoirement la pierre qui bouche l'entrée du tombeau. Les femmes reviendront le dimanche matin pour finir le travail. 

 

Les gardes : 

Selon Matthieu et lui seul, les Romains, à la demande des autorités Juives, mirent des gardes en faction devant le tombeau. Mais les romains craignaient-ils tant qu'on vola le corps pour faire cela ? S'ils avaient vraiment craint ce vol, ils n'auraient sans doute pas autorisé Joseph d'Arimathie à ensevelir Jésus de cette façon. En le mettant à la fosse commune, un vol éventuel aurait été plus difficile et beaucoup moins spectaculaire. Matthieu dit aussi que la rumeur prétendit que les juifs avaient soudoyé les gardes pour qu'ils ne révèlent rien du miracle dont ils avaient été témoins. Peut-être en effet y eut-il de l'argent versé mais ne peut-on pas imaginer qu'il le fut par ceux qui dérobèrent le corps ?

 

L'enlèvement : 

Peut-on imaginer les apôtres volant le corps ? La mort de leur maître les avait plongés, nous disent les Évangiles, dans le doute et un profond désarroi. Dans quel but auraient-ils dérobé le corps de leur maître et surtout à quel endroit auraient-ils envisagé de le cacher eux qui n'étaient pas de cette ville ? Imaginer que les apôtres, tels qu'ils sont dépeints dans la bible, auraient fait cela semble parfaitement absurde. Alors, pour tous ceux que la résurrection ne convaint pas, qui a pu voler le corps et dans quel but ?

 

Hypothèse des alliés de Jésus :

D'autres disciples ou plutôt d'autres sympathisants agissant dans l'ombre et dont ne parleraient pas les évangiles, plus pragmatiques que les apôtres, mieux organisés, plus puissants et bien implantés dans Jérusalem et dans la société du temps auraient-ils pu voler le corps ? De tels hommes auraient-ils pu ensuite fabriquer l'image du linceul après avoir aidé Jésus à se hisser au rang de Messie ? Quelles auraient été leurs motivations et leurs modes de fonctionnement ? Quel genre de rapport Jésus aurait-il pu entretenir avec ces gens ? Les apôtres (s'ils existèrent) étaient-ils au courant de ces agissements et certains d'entre eux faisaient-ils partie de ces hommes apparemment plus manipulateurs que mystiques ? Répondre à toutes ces questions permettrait, nous allons le voir, d'expliquer la création du linceul en l'an 30. C'est en fait l'hypothèse la plus fondamentale de mon scénario.
 
Mais avant de développer cette thèse, il convient de s'intéresser d'un peu plus près aux enjeux politico-religieux de l'époque.

  • Avant ce développement vous pouvez consulter les critiques du christianisme et de Jésus écrites par le philosophe Romain Celse dès le IIème siècle. 
  • Vous pouvez également consulter certains écrits (controversés) de l'historien Juif du 1er siècle Flavius Josèphe : (ICI) et (LA) 
  • Je vous renvoie enfin à l'excellente émission télévisée "Corpus Christie" dans laquelle plusieurs éléments de cette thèse sont exposés.

 

Influences et alliances de Jésus :

Si le linceul a bien été fabriqué au 1er siècle, cela n'a pu se faire qu'en étant mûrement préparé et planifié avant même la mort de Jésus. Si l'on ne part pas de ce principe, la relique redevient un objet impossible. Nous ne pourrons avoir une chance de comprendre et d'expliquer son apparition qu'en étudiant le contexte politico-religieux de l'époque et la personnalité même de Jésus. C'est ce que je fais dans le développement qui suit.

 

Les Esséniens :

Tous les auteurs de l'antiquité qui ont décrit les Esséniens les présentent comme une communauté recherchant une grande pureté spirituelle et physique, à l'image du peuple hébreu au désert, symbole de ressourcement :
 
Pour Pline, les Esséniens sont des ermites célibataires vivant "en la seule société des palmiers" qu'on a longtemps située géographiquement à Qumrân au nord de la mer morte. Des vestiges archéologiques du 1er siècle avant JC d'une importante implantation humaine fut retrouvée à cet endroit. On y a notamment mis à jour des bassins qu'on a pris pour des baptistères, des cellules, une bibliothèque et un scriptorium. C'est pour protéger leurs écrits de la répression romaine pendant la guerre des Juifs en 70 que les membres de la communauté auraient caché les manuscrits dits de la mer Morte dans des dizaines de grottes environnantes qui ne furent redécouvertes qu'en 1947. Depuis peu nous savons que cette région était à l'époque très fertile et qu'il y régnait une forte activité notamment commerciale autour du balsamier, de l'asphalte, des dattes et du sel. Tout le contraire du désert dans lequel les esséniens étaient sensés s'être retirés. On pense maintenant que Qumrân n'était nullement un monastère mais une ville parmi d'autres dans laquelle on fabriquait notamment de la poterie. Néanmoins les manuscrits dits de la mer morte furent bel et bien cachés à cette époque dans ses environs.
 
Flavius Joseph considère les esséniens comme une sorte d'ordre monastique, adeptes d'une religion à mystères, probablement héritière du séjour babylonien d'une partie du peuple hébreu déporté par Nabuchodonosor. Les esséniens sont versés dans l'étude des livres de la Bible et dans l'enseignement des Prophètes. Ils connaissent l'art de la divination et savent prédire l'avenir grâce à l'étude des textes sacrés et à la pratique de la purification. Leur âme immortelle est prisonnière de leur corps, vécu par eux comme simple enveloppe charnelle et périssable. A leur mort, "leur âme délivrée regagne avec joie les régions supérieures". L'historien juif fait remarquer la ressemblance de leurs préceptes avec ceux de l'école pythagoricienne. Il insiste aussi sur leur stricte observance des lois de Moïse.
 
Enfin, Philon d'Alexandrie fait un parallèle entre les esséniens et la secte des Thérapeutes vivant au bord du lac Maréotis. Cette relation est fort intéressante si l'on considère que l'enseignement de Jésus était très largement fondé sur la guérison des malades. Son enseignement en la matière était, semble-t-il, tout droit issu de ce que pratiquait cette secte des thérapeutes près d'Alexandrie.

 

Fondation de la communauté essénienne :

Durant la persécution religieuse qu'exerça Antiochos IV Épiphane au début du II° siècle av JC, de nombreux juifs furent obligés de renoncer à leur foi. En 125 avant notre ère, aidé par les occupants Séleucides qui exerçaient toujours une grande répression sur les Juifs, le roi Antipas pris le pouvoir. Il ne pouvait prétendre légalement au trône car il ne descendait pas de la lignée de David comme l'exigeait la loi instituée par Moïse et les grands prêtres d'Israël au moment de l'exode. Pour l'épauler et assumer le pouvoir spirituel, Antipas nomma un grand prêtre du Temple de Jérusalem qui, lui-même, n'était pas issu de la lignée des zadokims, descendants d'Aaron, comme l'exigeait là aussi la tradition mosaïque. Le grand prêtre légitime déchu de sa fonction, se retira alors au désert avec quelques fidèles où ils fondèrent la communauté des esséniens résolus à respecter les lois de Moïse et à écarter toute impureté de leur mode de vie pour attendre l'avènement du royaume de Dieu.

Pour tout essénien, le pouvoir politico-religieux en place à Jérusalem était illégitime et le culte pratiqué au temple ne se déroulait pas selon les lois de Moïse. Ce pouvoir devait disparaître surtout depuis qu'il collaborait ouvertement avec les nouveaux oppresseurs romains. La simple présence de ces païens souillait la Terre Sainte et le seul salut possible était le repli sur soi et la purification permanente de l'âme et du corps dans l'attente du royaume de Dieu.

 

Le Maître de Justice :

Vers 70 avant JC, celui que les esséniens appellent "le Maître de Justice", (certains pensent qu'il pourrait s'agir du fondateur de la communauté en personne), se rendit au Temple de Jérusalem pour y dénoncer les autorités. Il fut arrêté et exécuté dit-on par crucifixion. Après sa mort, ses fidèles prétendirent qu'il était sorti de sa tombe le troisième jour et qu'il était monté au ciel ! Avant de disparaître, il avait promis d'envoyer un grand Messie avant la fin des temps imminente pour diriger le Jugement Dernier et inaugurer le Royaume des Saints sur la Terre. Voilà ce qu'attendaient tous les esséniens depuis lors et ces écrits sont antérieurs à la naissance de Jésus et de Jean le Baptiste. La croyance en la venue d'un Messie et en la résurrection des morts à la fin des temps n'était pas une exclusivité essénienne mais cette communauté était certainement composée des plus fervents adeptes de cette prédiction. Ils pensaient qu'un Messie* viendrait bientôt pour les sauver eux, dont le mode de vie en accord avec les lois dictées par Dieu à Moïse en faisait les seuls dignes d'entrer dans le royaume de Dieu.

*Messie (ou Machia'h) :  Roi envoyé ou légitimé par Dieu (ouin de Dieu) comme l'avaient été David, Salomon et tous leur descendants. Pour les juifs du 1er siècle le terme Messie revêtait une signification très différente de la conception chrétienne : Un nouveau Messie (roi des juifs et seulement des juifs) devait venir pour anéantir ce monde corrompu, renverser Erode l'imposteur, faire cesser la corruption et chasser les païens du sol sacré avant de règner sur le royaume enfin réunifié et revenir à la pratique de la Torah. Cette conception du Messie n'avait rien à voir avec "le Messie" des chrétiens venant pour sauver l'humanité tout entière de la mort y compris les Romains.

 

Jean Baptiste et son disciple :

Les évangiles canoniques nous disent que Jésus fut annoncé puis baptisé par Jean le baptiste qui fut arrêté puis exécuté par Hérode Antipas afin que Jésus commence son ministère. Selon les évangiles, Jean serait né en même temps que Jésus et son rôle était celui du prophète Élie dont les prophéties disaient qu'il viendrait pour annoncer et préparer la venue du Messie. Qu’en est-il de cette version ? L’étude des quelques évangiles apocryphes qui nous sont parvenus jette là encore de sérieux doutes sur la véracité des faits qui sont décrits dans les évangiles canoniques. Certains historiens pensent aujourd’hui que Jean le Baptiste était plus âgé que Jésus qui, en fait, était son disciple. Bien entendu, cette hiérarchie des âges ne pouvait être évoquée par les évangélistes pas plus d’ailleurs que la très forte influence de la pensée essénienne sur les deux hommes. Tout comme Jésus ne pouvait naître que d’une vierge fécondée par le St Esprit, le Messie ne pouvait avoir de maître et sa pensée ne pouvait être qu’un surgissement totalement original et nouveau : une révélation !
 
Grâce aux manuscrits de Qumrân qui ont pu être étudiés, nous savons aujourd’hui tout ce que Jean Baptiste et son disciple Jésus devaient aux rituels, à la pensée, à la médecine et à la rhétorique des esséniens. Le baptême, la purification de l'esprit et du corps, la résurrection des morts, l'annonce de l'apocalypse et du royaume de Dieu, l'attente du Messie, l’amour du prochain (entendez du compagnon essénien et non de l'humanité) et le désintéressement (chaque essénien devait en effet vendre ses biens pour en faire profiter la communauté) sont entre autres choses des caractéristiques esséniennes dont on retrouve trace dans des écrits d'avant Jésus. L’importance du corps et de sa purification en vue de guérir les maladies et les infirmités fut une dimension très importante de l'enseignement du Jésus historique. Si l'on en croit l'évangile de la paix (dont certains pensent qu'il pourrait être du 1er siècle), Jésus aurait cru en la terre mère et aux vertus thérapeutiques de l'air et de l'eau ainsi qu'à une nourriture saine. Cette pratique de la médecine était semblable à celle de la secte des Thérapeutes connue à cette époque dans la région d'Alexandrie. Les évangiles canoniques auraient là encore très largement estompé cette dimension de l'enseignement de Jésus et de ses disciples. Ils ont enfin totalement masqué la filiation entre la tradition essénienne et les actes du Christ.

 

La dissidence :

Ce que nous pouvons avancer aujourd'hui c'est que Jésus et son maître Jean le Baptiste étaient deux esséniens en rupture idéologique et politique avec la communauté qui les avait formés. L'originalité de leur enseignement reposait entre autre sur le fait que Jean entreprit de baptiser tout le monde et non plus les seuls initiés et que Jésus baptisa c'est-à-dire purifia non plus avec de l'eau mais par l’esprit saint. L’autre dissidence de Jésus, sans doute la plus impardonnable pour ses frères esséniens, fut d'enseigner la bonne nouvelle de la venue imminente du royaume de Dieu en dehors de la communauté, au sein même du peuple tant méprisé par ses frères.
 
Pourquoi Jean et Jésus décidèrent-ils un jour, contre les préceptes de leur communauté et au risque de leur vie, de partir à travers le pays baptiser le peuple et prêcher la bonne nouvelle en tournant visiblement le dos à leurs anciens compagnons ? Les esséniens étaient essentiellement des reclus coupés du monde ne faisant qu'attendre passivement la fin des temps. Jean et Jésus qui avaient en commun la haine des Romains et du système politico-religieux qui régnait en Israël depuis plus d'un siècle, à l’instar de nombreux agitateurs qui menaient leur combat dans tout le pays à cette époque, décidèrent de se rallier le peuple et peut-être dieu lui-même pour parvenir à renverser le pouvoir en place et à chasser les Romains. L'un et l'autre ne pouvaient tolérer plus longtemps la suprématie et la corruption des grands prêtres, des pharisiens et des scribes, pas plus que celle des Romains qui tenaient le pays d'une main de fer en le souillant de leur seule présence. Que furent véritablement les objectifs de Jean puis de Jésus ? Eurent-ils les mêmes ambitions ? Furent-ils de vrais mystiques ou de simples agitateurs politiques utilisant la religion pour parvenir à leur fin ? Voyons le cas de Jésus qui nous intéresse plus particulièrement.

 

Être ou ne pas être :

Comme tout essénien, Jean et Jésus avaient une vision eschatologique du monde. Ils annonçaient l'imminence de la fin des temps et enseignaient la nécessité de se préparer à l'avènement du royaume de Dieu sur la terre. Jésus crut-il vraiment à cela et pensa-t-il qu'il était le Messie annoncé un siècle plus tôt par le maître de justice ? Comme je ne crois pas aux faiseurs de miracles, j'imagine aisément qu'il constata bien vite que sa rhétorique essénienne même bien rodée, son aura naturelle et ses dons de guérisseur ne suffiraient pas pour convaincre le peuple et les autorités religieuses de sa nature divine.
 
On peut imaginer que c'est à ce moment qu'il réunit un groupe d'hommes capables de l'aider à devenir roi d'Israël et grand thaumaturge. Des gens bien organisés comptant dans leur rang une ou plusieurs personnes maîtrisant l'art de la magie auraient pu sans difficultés lui organiser toutes sortes de miracles afin de l'aider à se hisser plus rapidement et plus sûrement au rang de grand prophète puis de Messie. A sa mort, pour les raisons que je développe plus bas, ces hommes auraient dérobé son cadavre et fabriqué le linceul portant son image pour tenter de prouver sa résurrection.
 
Beaucoup de questions restent en suspens comme par exemple : Jésus fut-il le fils d'un charpentier né dans une étable, pauvre parmi les pauvres tel qu'on nous le présente dans la bible ? Certains historiens pensent aujourd'hui qu'il naquit dans une famille bien plus élevée dans l'échelle sociale. St Paul écrit cette curieuse phrase dans la deuxième épître aux Corinthiens, l'un des plus anciens écrits chrétiens datant d'environ 60 de notre ère : "Vous connaissez, en effet, la libéralité de Notre-Seigneur Jésus Christ, qui pour vous s'est fait pauvre, de riche qu'il était, afin de vous enrichir par sa pauvreté." Comme l'on fait remarquer certains historiens, le mot "charpentier" (tekton en Grec) qui qualifie Joseph, pouvait tout aussi bien désigner à cette époque un riche entrepreneur ou un sage ou encore un érudit. Qui donc était le Jésus historique ? Pauvre, il l'était probablement devenu après s'être fait essénien mais venait-il d'une classe supérieure qui lui faisait penser qu'il pouvait revendiquer légitimement le trône d'Israël ? Son enseignement fut-il seulement spirituel, thérapeutique et eschatologique ? N'était-il accompagné que de 12 Apôtres doux et inoffensifs ? Comment a-t-il pu chasser tout seul les marchands du temple ? Qui aurait dérobé le cadavre du tombeau et par qui aurait été fabriquée l'image de son linceul juste après sa mort ? Pourquoi se présentait-il comme descendant de David, et pourquoi les Juifs et les Romains semblèrent-ils lui reprocher non de se dire fils de Dieu (ce qui à l'époque n'était pas forcément un blasphème) mais de se présenter comme roi légitime d'Israël ? Comment Jésus se percevait-il lui-même ? Se crut-il le Messie ou voulait-il seulement conquérir le trône d'Israël après avoir renversé le pouvoir en place et chassé les Romains avec l'aide du peuple ?
 
En résumé, si le linceul fut bien fabriqué à partir de son cadavre, c'est qu'il eut bien des alliés politiques qui, de son vivant, l'aidèrent à asseoir son image prophétique et œuvrèrent, après sa mort, à faire de lui le Messie. Pour moi, la question n'est pas de savoir s'il se fit aider par une organisation qui dépassait largement le cercle des Apôtres mais de savoir s'il ne fut qu'un politicien en campagne qui exploita une croyance populaire en se faisant passer pour un faiseur de miracles afin de devenir roi d'Israël ou s'il s'arrangea de l'action je dirai "médiatique" de ces hommes tout en continuant de croire en sa nature divine, ce qui dans ce cas ferait de lui un paranoïaque manipulateur doublé d'un schizophrène éventuellement manipulé.
 
Tout ce qui compte pour mon développement c'est de démontrer l'existence de l'organisation qui aida Jésus à se hisser au statut de prophète puis de Messie. Je pourrais donc m'arrêter là mais au-delà du linceul, la question de savoir qui était Jésus m'a intéressé et je l'ai développée dans les lignes qui suivent. Bien entendu, rien ne vous oblige à les lire et vous pouvez passer directement au chapitre suivant en cliquant ICI. Néanmoins, pour ceux que cela intéresse, reprenons notre développement en supposant l'action secrète d'un groupe d'alliés politiques agissant dans l'ombre du prophète.

 

Les miracles :

Rien ne prouve en effet que les grands miracles de Jésus décrits dans les évangiles aient bien eu lieu. Cependant, s'ils furent une réalité, on peut réfléchir au fait que ces miracles diffèrent de ceux de l'ancien testament.
 
Prenons en trois : la transformation de l’eau en vin – la multiplication des pains et des poissons et la résurrection de Lazare.
 
Dans l’ancien testament, la manière dont sont relatés les miracles et le fait qu’ils arrivent toujours à point nommé donnent à ces événements leur apparence miraculeuse. Cependant, quand on considère le phénomène d’un point de vue rationnel, il s’agit toujours d’un événement explicable par des causes naturelles. Sans entrer dans les détails que d’autres ont déjà abondamment commentés, les sept plaies d’Égypte et la traversée à pied sec de la mer rouge n’eurent rien du spectacle Hollywoodien que notre époque leur prête. Pas plus que la victoire de David sur Goliath. Tous ces événements ont pu être expliqués par des phénomènes naturels. Mais les miracles de Jésus n’obéissent pas aux mêmes règles. Il s’agit à chaque fois d’un acte "magique" qui ne peut être qu’un miracle ou une manipulation mais surtout pas un phénomène naturel. Les scientifiques aujourd'hui sont unanimes pour reconnaître que les lois de la physique sont non seulement les mêmes partout dans l’univers mais aussi qu’elles régissent le comportement de la matière de façon prévisible et inviolable. Pour admettre que les actes de Jésus sont des miracles, il faudrait aussi admettre à chaque fois un viol manifeste des lois de la physique. Description :
 
L’eau changée en vin, le premier miracle historique de Jésus, est un tour de passe-passe vieux comme le monde et ce n’est même pas la peine qu’on s’y attarde. Il suffisait que le maître de maison et quelques amis ou serviteurs soient "dans le coup".

La multiplication des pains et des poissons implique (si c’est un miracle) que de la matière organique ait été fabriquée à partir de rien et cela en quelques heures. Biologiquement c’est possible mais seulement par la reproduction naturelle des poissons ou du blé. Ce sera peut-être possible un jour d’y arriver grâce à la science et à la technologie quand nous maîtriserons un peu mieux l’atome. Mais cela ne pourra pas se faire sans une infrastructure très lourde s’appuyant sur un savoir et une technologie ultra sophistiquée ; et pas sans mettre en jeu une quantité d’énergie absolument colossale ! Si l’on ne croit pas aux miracles et qu'on admet que les lois de la physique sont incontournables et que le 1er siècle ne possédait pas la technologie indispensable pour produire de la matière organique à partir de rien, il doit y avoir une explication plus simple à cette production de matière organique.

On sait que cette multiplication des pains s’est déroulée sur le sommet d’une colline. La position en contrebas de la population rendait possible un tour de passe-passe enfantin. Une cache pratiquée dans ce qui était peut-être une ancienne galerie de mine affleurant à la surface du monticule aurait aisément fait l'affaire pour remplir par en dessous de grands paniers tressés dont le fond se détachait. La position en contrebas du public offrant le double avantage de rendre le maître bien visible tout en garantissant l’invisibilité du remplissage.
 
Dans les évangiles, cet événement est présenté comme improvisé. Jésus suivi par des milliers de gens se voit sollicité par ses apôtres qui lui demandent, inquiets, comment il compte faire pour nourrir tout ce monde ? Les vivres et les finances sont loin d’être suffisantes et ces gens ont faim et on ne peut les renvoyer chez eux. Alors Jésus semblant improviser les mène tous vers une colline. Une fois sur place, il fait rassembler les pains et les poissons dans de grands paniers et le miracle se produit. Tout le monde est rassasié et il en reste même pour le lendemain ! Un publicitaire moderne dirait que le public est captif et entièrement réceptif au message de cet homme venant au nom de dieu faire un miracle très spectaculaire et fort utile. Les gens sont si reconnaissants et impressionnés par ce qu'ils voient et entendent qu'ils vont faire marcher à fond le bouche à oreille qui, comme chacun sait, est la meilleure des publicités. Les Romains régnaient sur la plèbe avec du pain et des jeux. Jésus captive le peuple avec des guérisons, de la nourriture, du spectacle et des promesses. Notre monde moderne a inventé la publicité et le supermarché . . . ainsi va le monde !
 
Une telle action demande à l’évidence beaucoup de réflexion et d’astuces non seulement pour l'organiser mais aussi pour en calculer l'impact et les retombées en terme de communication. Tout cela réclame une préparation minutieuse et un nécessaire financement. Il fallut acheter beaucoup de pains et de poissons ; les transporter et les stocker pas trop à l’avance dans la galerie et concevoir un procédé de remplissage par-dessous qui fonctionne bien et reste invisible au public. Notre époque n’a pas inventé la communication ni les tours de prestidigitation dont étaient friands tous les peuples de l'antiquité. Comment les apôtres, toujours auprès de leur maître et qui furent décrits comme des hommes frustres et un peu naïfs, auraient-ils pu concevoir, préparer et financer ce stratagème ? Pourquoi l’auraient-ils fait, eux qui, nous dit-on, croyaient en Jésus et en ses pouvoirs ? Malgré l’époque à laquelle nous vivons et l'éducation rationnelle que chacun peut aujourd'hui recevoir, les adeptes des sectes modernes croient eux aussi dur comme fer et parfois jusqu’à la mort aux miracles et aux prédictions de leur gourou. A plus forte raison quelques apôtres pouvaient parfaitement prêter la main à ces manipulations pendant que d'autres se laissaient berner.
 
La résurrection de Lazare semble, elle aussi, très simple à mettre en œuvre. Il suffisait à Lazare de simuler la mort et de rester enfermé dans un tombeau pendant trois jours en attendant que Jésus vienne le tirer de là. Bien entendu, Lazare et Jésus étaient complices et ils se sont arrangés pour qu'un public nombreux assiste au spectacle. Dans l’évangile de Jean où cet événement est relaté, il est dit que les Juifs reprochèrent à Lazare d’avoir fourni à Jésus une telle publicité. Cela montre selon moi à quel point les Pharisiens et les autorités religieuses ne furent là encore pas dupes du stratagème mais ce qui comptait, c’était que le peuple y croit.

 

Le disciple que Jésus aimait :

Lazare fut-il ressuscité ou était-il complice de Jésus ? Cela ne fait pour moi aucun doute et s’il fut son complice, comment ne pas imaginer qu’il participât à l’élaboration des autres miracles décrits ci-dessus ? Il ne pouvait pas être seul pour organiser cela. D’autres hommes dont les évangiles nous cachent l'existence devaient agir en secret et en toute complicité avec Jésus et, je le pense, avec une partie au moins de ses apôtres. L'objectif de ces hommes était de tout faire pour que Jésus accède rapidement et fortement au statut de prophète et si possible à celui de Messie.
 
Qui était ce "disciple que Jésus aimait" dont nous parle St Jean ? Ce disciple dont l'évangéliste cache encore la véritable identité deux générations après les événements ? Plus personne aujourd'hui ne pense qu'il s’agissait de l'apôtre Jean. Certains historiens croient en revanche qu'il pouvait s'agir de Lazare. Ce riche aristocrate serait l'homme qui raconta ses souvenirs au rédacteur de l'évangile selon st Jean. Lazare que Jésus avait ressuscité juste avant son entrée à Jérusalem pouvait-il être un des membres de ces sympathisants de l'ombre ? Leur chef peut-être ? A moins que le chef ne fut Joseph d'Arimathie ? Les deux hommes et quelques autres dirigeaient-ils une coalition visant à renverser Hérode et à chasser l'occupant romain en se fondant sur la popularité et le statut quasi divin de Jésus ? Ces alliés de l'ombre après la mort de Jésus devaient-ils à tout prix faire croire à sa résurrection pour donner un sens à sa mort et en faire un envoyé de Dieu ? Devaient-ils faire cela pour pouvoir continuer à exploiter à des fins politiques les idées qu'il incarnait et propageait de son vivant

 

Une alliance d'intérêts communs :

Si l'aristocrate Lazare et le notable Joseph d'Arimathie faisaient partie de ce groupe, il est permis de penser que ces gens devaient occuper un rang élevé dans la société de l’époque, plus élevé que celui des apôtres et du Jésus biblique mais peut-être comparable à ce que fut le rang véritable du Jésus historique (voir plus haut : Être ou ne pas être) Un rang qui selon l'enseignement de Jésus et des esséniens en faisait des gens indignes d'être sauvés à la fin des temps. Ces hommes étaient-ils déjà les alliés de Jean le Baptiste avant son arrestation ? Quoi de plus fort, surtout à cette époque, qu'une grande figure religieuse à même de soulever le peuple contre un pouvoir illégitime et corrompu ? Ces hommes aidèrent-ils Jésus à prendre la succession de Jean Baptiste après son arrestation ? Soit Jésus leur apparut alors comme le seul recours pour continuer le combat du maître que certains commençaient déjà à pressentir comme le Messie, soit ces hommes faisaient déjà partie de l'entourage de Jésus. Le nouveau maître est doué d'une intelligence et d'un charisme extraordinaire et il possède le don de guérir certaines maladies. En somme, tout ce que fit Jésus pendant son ministère aidé par ces alliers de l'ombre fut un génial et très courageux travail de communication. Ce que firent ses disciples après sa mort continua d'être le plus extraordinaire travail de propagande de l'histoire. Ces gens réussirent à faire croire au monde, en y croyant visiblement eux-mêmes, et pour des millénaires, que "dieu fait homme" avait ressuscité d'entre les morts pour laver les repentants et les justes de leurs péchés afin de leur apporter la vie éternelle après la mort et non plus à la fin des temps et cela pour tous les hommes et non pour les Juifs seuls ! Et ils firent cela en implantant cette croyance au sein même de la civilisation la plus contraire à l'esprit de générosité et de pardon qu'était le monde romain. Ils réussirent à convertir dans son entier l'empire despotique qui pourtant avait tué leur dieu et les avait persécutés avec tant de barbarie pendant trois siècles. C'est un tour de force sans équivalant dans l'histoire du monde et tout cela fut fait au prix d'efforts considérables, de terribles sacrifices et de manipulations théologiques flagrantes. Le peuple Juif fut accusé de persister dans son erreur de ne pas vouloir reconnaître une vérité dont on cacha soigneusement qu'ils en étaient les vrais inventeurs. On qualifia les Juifs de peuple déicide afin de disculper les Romains du crime. On sait ce que cette propagande provoqua en différentes périodes de l'histoire où des boucs émissaires étaient requis et quelles proportions monstrueuses prirent ces persécutions au XXème siècle.

 

Le premier évangile en image :

Bien avant qu'on ne pense à coucher par écrit la vie de Jésus en le montrant comme le Messie, dans l'urgence qu'il y avait à poursuivre le travail de soulèvement populaire qu'il avait entrepris de son vivant, il n'y a rien d'étonnant à ce que ces hommes de l'ombre, encore une fois plus pragmatiques que mystiques, plus unis à Jésus par calcul politique que par convictions religieuses, aient eu l'idée et la volonté de fabriquer un linceul miraculeux pour prouver sa résurrection à des païens avides d'images. En donnant un sens à la mort de ce prophète sur lequel ils avaient fondé leur stratégie de reconquête du pouvoir, ils en faisaient bien plus qu'un martyr à leur cause. Il devenait le Messie que tout le monde attendait, détenteur et annonciateur de la volonté divine ; une arme politique qui pouvait se révéler formidablement efficace. Qui devait succéder à Jésus ? Était-ce Jacques son frère qui prit la tête de la première communauté chrétienne de Jérusalem et n'accepta jamais que des non Juifs deviennent disciples de sa secte ? Lui aussi selon toute vraisemblance devait descendre de David. La naissance d'une dynastie de droit divin ?

La passion :

Une fois dans Jérusalem, Jésus pouvait avoir au moins trois stratégies possibles. Tout dépend de ce que fut sa véritable personnalité :

1 - Soit il était mu par une simple ambition politique et échoua après avoir tenté de jouer le tout pour le tout. Il réussissait à provoquer le grand soulèvement populaire longtemps espéré qui lui permettrait grâce au peuple d'Israël de renverser le pouvoir en place et de chasser les Romains. Jésus, descendant de David, monterait en toute légitimité sur le trône de son aïeul et deviendrait roi d'Israël rétablissant l'ordre perdu deux siècles auparavant.

2 - La deuxième possibilité était qu'il se prenait vraiment pour le Messie. Une fois dans Jérusalem, il comptait sur l'intervention de Dieu pour rétablir l'ordre et préparer la venue de son royaume. Dans ce cas, on peut se demander comment il géra psychologiquement le fait qu'il dut fabriquer artificiellement ses miracles pour parvenir à ses fins. Devant la tournure que prirent les événements, il dut se résoudre progressivement au sort qui fut le sien en se demandant jusqu'au bout si Dieu finirait par intervenir.

3 - La troisième possibilité était qu'il comptait dénoncer le pouvoir sans chercher à se protéger et dans le but conscient d'être arrêté et condamné à l'instar de son grand modèle le Maître de justice dont il prévoyait de répliquer l'action afin que son sacrifice fasse de lui ce qu'en on fait les Évangiles. J'ai personnellement beaucoup de mal à croire au fait que Jésus se vit tel que nous le voyons aujourd'hui en fondateur d'une nouvelle religion conscient de tout ce qui allait se passer jusqu'à sa résurrection. La première et la seconde hypothèse bien que fort différentes, me semblent plus probable.

Jésus le Nazôréen roi des Juifs :

Tout le discours biblique de Jésus repose sur la croyance en la venue imminente du royaume de Dieu en remplacement de ce monde. S'il croyait cela, comment cet homme aurait-il pu briguer un quelconque pouvoir terrestre ?

D'un autre côté, la scène où Hérode se moque de lui en lui mettant un manteau de roi et celle où les soldats romains lui mettent une couronne d'épines, un roseau en guise de sceptre et une tunique rouge en l'appelant roi des Juifs nous renseignent sur la manière dont le voyaient certains de ses contemporains. Le titulus placé en haut de la croix par Pilate où il fait écrire "Jésus le Nazôréen roi des Juifs" suggère là encore que c'est sa prétention monarchique qui lui fut reprochée et non sa filiation divine. Ce n'est pas sa rhétorique religieuse qui dérangea le plus, même si c'est ce qu'on invoqua pour le tuer, mais bien ses actions politiques. D'ailleurs, les juifs qui demandent à Pilate d'écrire non pas "roi des Juifs" mais "celui-ci a dit : je suis le roi des Juifs" montre bien à quel point cette affirmation leur faisait peur. Les Romains quant à eux s'en moquaient. La seule chose qu'ils craignaient était un soulèvement populaire. Dans cette perspective, l'inscription de Pilate prend tout son sens. "Jésus le Nazaréen" ou "Jésus de Nazareth" sont, on le sait aujourd'hui, une mauvaise traduction de "Jésus le Nazôréen". La meilleure preuve étant que la ville de Nazareth n'existait pas encore à cette époque. Les Nazôréens semblent avoir été une secte Juive en lutte contre l'occupant romain, qui s'appuyait sur une forme d'intégrisme religieux pour galvaniser ses adeptes. Le terme "Nazôréen" était donc pour les Romains l'équivalent de ce qu'on appellerait aujourd'hui "Intégriste", "illuminé" ou "fou de dieu". Ainsi l'inscription de Pilate signifiait : "Votre roi n'est qu'un illuminé et voilà ce que j'en fait", sous entendu : "Vous êtes un peuple conquis, votre seul dieu est César et c'est à moi qu'il a délégué ses pouvoirs". Les peurs des Juifs n'étaient pas celles des Romains mais tous avaient intérêt à éliminer Jésus et les idées qu'il représentait. Sa mort devait être infamante afin de désamorcer son message.

Un autre plan :

Si Jésus fut peut-être le mystique que dépeignent les Évangiles, les complices qui l'aidèrent à accomplir ses miracles, voyaient sûrement les choses de manière infiniment plus réalistes et pragmatiques. Devinant comment tout cela risquait de finir, ils s'étaient sans doute préparés depuis longtemps une issue de secours. Si Jésus était arrêté et si, selon toute vraisemblance, il se retrouvait crucifié comme c'était le cas pour tous ceux qui défiaient l'ordre public, il faudrait faire en sorte de mettre à profit son image prophétique afin d'en faire une arme politique. Les alliés de Jésus savaient déjà comment ils allaient s'y prendre. Ils comptaient dans leur rang un homme habile et qui leur avait déjà depuis longtemps proposé une idée fort ingénieuse. Il savait comment faire apparaître l'image d'un corps sur un drap de lin blanc. L'homme avait fait des essais et ça avait marché. Sa technique était au point, rapide et efficace mais il fallait garantir certaines conditions pour que ce soit possible. Le corps de Jésus ne devait pas être jeté à la fosse commune comme c'était le cas pour la plupart des crucifiés. Il devait bénéficier d'une sépulture digne de ce nom pour avoir un linceul. Cela permettrait aussi de faire que sa "disparition" ne passe surtout pas inaperçue. Le tombeau, le linge et le faussaire étaient prêts selon moi bien avant la condamnation, et si la passion fut aussi courte que l'ont relatée les Évangiles (tous les historiens ne sont pas d'accord là dessus), tout était peut-être prêt avant même l'entrée de Jésus dans Jérusalem. 

Trois éclaircissements possibles :

Ce ne sont bien entendu que des hypothèses invérifiables mais j'entends procéder de la seule façon qui me soit possible, non comme un scientifique mais comme un policier qui suit la piste la plus logique en se fondant sur quelques faits historiques et la plus élémentaire vraisemblance. Si donc les évènements se sont déroulés ainsi, certaines choses qui m'ont toujours posé problème pourraient là encore trouver une explication :
- La crise d'angoisse qu'éprouve Jésus au jardin de Gethsémani où il transpire du sang (symptôme rare mais connu appelé hémathidrose. Cette sueur sanglante s'observe chez des gens éprouvant une très forte angoisse) et où il demande à ses disciples de le soutenir en ne s'endormant pas pendant qu'il prie dieu d'éloigner de lui "si c'est possible" cette "coupe de douleur" qui le remplit d'effroi. Le "si c'est possible" indique bien que Jésus à ce moment-là est rongé par le doute. Il n'est plus si sûr d'être celui qu'il prétend être et de pouvoir endurer la souffrance et surmonter la mort.

- On pourrait aussi évoquer ce surprenant "mon dieu, mon dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?" qu'il prononce sur la croix juste avant de mourir. A ce moment-là, il semble constater amèrement qu'il s'est trompé et que dieu n'interviendra plus ni pour apaiser ses souffrances, ni pour le sauver. En prononçant ces mots, il montre qu'il n'envisageait peut-être pour lui-même qu'une grande souffrance mais pas la mort et apparemment pas ou plus la résurrection.

- Si les choses furent ainsi, cela pourrait aussi expliquer l'efficacité du faussaire. Un corps, surtout par ces chaleurs, ne se conserve pas longtemps et il fallait agir vite. Pas question de se concerter pour trouver comment faire. La complexité de la technique employée ne pouvait s'improviser dans l'urgence. Une telle rapidité d'exécution donnant de surcroît un résultat aussi parfait réclamait à l'évidence une préparation minutieuse et un plan préétabli. Pour la fabrication de l'image, nous ne savons pas si elle fut rapide mais nous savons que le voile d'Édesse apparaît très tôt, entre un et deux ans après la date supposée de la mort de Jésus. Nous pouvons également supposer que les alliés de Jésus n'avaient pas de temps à perdre. Plus cette preuve de la résurrection du Messie pouvait être produite rapidement et plus elle aurait de chance de remplir efficacement sa fonction.

 

Pourquoi le linceul ne fut-il pas utilisé politiquement ? :

A vrai dire je n'en sais rien et ce n'est pas vraiment important pour mon déroulement. Malgré tout, on peut supposer que les protagonistes furent rapidement arrêtés ou durent s'expatrier à cause des persécutions antichrétiennes qui débutèrent très tôt après la mort de Jésus.

Peut-être également que les premiers chrétiens de Jérusalem furent divisés. N'oublions pas que c'est Jacques le propre frère de Jésus qui dirigea un temps la toute première communauté de Jérusalem. On peut penser que ces premiers chrétiens n'eurent pas vraiment envie d'intégrer dans leur rang ces gens aux ambitions un peu trop politiques et qui en savaient un peu trop long sur la véritable nature de la résurrection et des miracles de Jésus. Peut-être même y eut-il des tensions entre ces groupes qui ne permirent pas à ceux qui ne voyaient en Jésus qu'une caution spirituelle à leurs ambitions politiques de mettre leur plan à exécution. Par la suite, le linceul, objet impur pour les Juifs, fut apporté à Édesse où le roi Abgar V avait proposé l’asile à Jésus juste avant sa mort. On sait aujourd'hui que cette ville devint effectivement le foyer de la toute première implantation chrétienne de l’Histoire.

 Et Judas ? :

Certains pensent que Judas n'existât pas ou que ce prénom (au demeurant fort répandu à l'époque) ne fut utilisé que pour faire porter plus efficacement aux Juifs de Judée la responsabilité du déicide. Dans l'hypothèse ou le dénonciateur de Jésus aurait bien existé, je me suis pris à penser que cette dénonciation pouvait avoir un lien avec nos mystérieux planificateurs de miracles.

Voyant Jésus devenir de plus en plus populaire et croire de plus en plus à sa bonne étoile, ses "alliés" eurent peut-être peur de ne plus pouvoir contrôler la situation. Son éviction était peut-être même prévue de longue date et son arrestation suivie de son exécution par les autorités Juives et Romaines pouvaient alors servir leur plan.

Après l'avoir laissé se compromettre auprès des autorités et même vis-à-vis du peuple en chassant les marchands du temple, ses "alliés" n'avaient plus qu'à favoriser son arrestation pour se débarrasser du danger et de l'obstacle qu'il pouvait représenter. Une fois mort, il faudrait prouver qu'il avait ressuscité pour que le catalyseur qu'il avait été de son vivant devienne le Messie tant attendu capable de soulever le peuple avec assez de force pour renverser le pouvoir en place et chasser les Romains. Pourquoi ne pas imaginer alors que Judas Iscariote ait dénoncé Jésus en accord avec ces anciens complices ? Judas tenait les cordons de la bourse pour le groupe. A ce titre, il était probablement un homme pragmatique parfaitement au courant des faux miracles qui avaient contribué à élever artificiellement Jésus au rang de prophète populaire. Cela suffisait à faire de lui un homme qui ne croyait pas ou plus à la nature divine et messianique de son ancien maître. Peut-être fut-il dès le début une taupe au service de ces hommes qui maintenant avaient décidé d'en finir avec l'aura temporelle de Jésus. Il ne le dénonça évidemment pas pour les 30 deniers mais pour que s'accomplisse le plan machiavélique de ses amis politiques. Si cette version particulièrement noire des événements est la bonne, on comprendrait mieux les raisons qui auraient pu opposer ces traîtres à la première communauté chrétienne qui, ayant choisi de s'organiser pour attendre le jugement dernier en abandonnant le combat politique devenu sans objet depuis la mort du Maître, auraient tout fait pour leur ôter la possibilité de poursuivre leur action. Cette version n'est qu'une hypothèse. Je n'en tire aucune conclusion et je ne la soumets qu'à titre de réflexion.

Quoiqu'il en soit, la nuit de shabbat du vendredi au samedi de pâques de l'an 30 se déroula sans tentative de profanation du tombeau. L'enlèvement eut lieu la nuit suivante. Trois ou quatre hommes déplacèrent la pierre qui fermait l'entrée du tombeau et emportèrent le corps. Le transportèrent-ils dans le linceul ? Fallut-il soudoyer les gardes romains ? On l'emporta et l'histoire commença.







Chapitre 1 Chapitre 2 Chapitre 3 Chapitre 4
Avant propos Les bases du scénario Contexte historique Hypothèses sur la fabrication

Tête

Hypothèses sur la fabrication 


Une réaction de Maillard ?

Six anomalies inexplicables
Deux positions différentes du linge
Les traces de flagellation sur l'arrière des jambes
Pas de trace de pression sur l'arrière du corps
Les cheveux pendent verticalement
L'anomalie du crâne tronqué
Les leptons
La couche "d'impuretés"
Les repeints du sang
Une image un peu trop présentable
La justesse anatomique des traces de sang
La fluidité du sang
La fabrication de l'image
Le moule
Le problème des jambes
Les conditions pour que cet objet soit réalisable
Quatre propositions de réflexion
Trois techniques de moulage
Chauffage par pic thermique
Par chauffage interne
Les cheveux
Tout ce que pourrait expliquer mon hypothèse
Il reste peu de questions sans réponse
Voyons du côté de l'aragonite
Un savoir empirique
L'image dans son époque

Qu'est ce qui prouve que le faussaire vivait au 1er siècle ?

Résumé du dispositif en 10 points

En guise de conclusion


Une réaction de Maillard ? :

Selon les récentes observations du chimiste américain Raymond Rogers, l'image serait apparue grâce à une Réaction de Maillard. Cette réaction chimique provoque une "déshydratation oxydative" des sucres réducteurs aboutissant à la formation de mélanoïdine (le même phénomène qui teinte et parfume la peau d'un poulet rôti, la croûte du pain ou le café torréfié). Selon Rogers, quelque chose, chaleur ou émanations gazeuses dégagées selon lui par le cadavre, aurait provoqué ce phénomène colorant de façon indélébile non les fils de lin du tissu mais une couche ultra fine et superficielle d'impuretés composées d'amidon et de saponine enrobant les fibrilles de surface du linge.

Cette théorie est intéressante à plus d'un titre. Pour la première fois depuis longtemps, elle fait appel à des phénomènes naturels simples qui nous changent des théories pseudo-scientifiques parlant d'invention précoce de la photographie ou de corps qui se volatilise dans un grand éclair de neutrons. Pour la première fois, cette théorie expliquerait la superficialité et la double superficialité de l'image. Elle expliquerait aussi la couche brune qui ne pénètre ni dans les fibres ni dans l'épaisseur du drap. Et elle expliquerait tout cela en s'appuyant sur des phénomènes compatibles avec les connaissances du 1er siècle. En revanche, elle échoue aussi totalement que les autres à expliquer certaines caractéristiques de l'image. Elle échoue parce que Rogers n'a voulu l'expliquer que d'un seul point de vue. Ce scientifique pensait en effet que le linceul était bien celui de Jésus mais que l'image devait s'être formée par un processus naturel. L'idée qu'il puisse s'agir d'un faux du premier siècle ne sembla pas lui paraître envisageable. Pourtant, penser qu'un phénomène naturel pourait expliquer la formation de l'image rend sa théorie très improbable.

Six anomalies inexplicables si le processus de formation de l'image fut naturel comme le pensait Rogers

1 - Deux positions différentes du linge :

Les chercheurs qui ont étudié le linceul se sont aperçus que les taches de sang et l'image obéissaient à deux principes opposés :

Les taches de sang épousent la forme du corps. C'est-à-dire qu'elles se sont imprimées sur un linge déformé selon l'anatomie du cadavre. L'empreinte ainsi obtenue est distordue notamment au niveau du crane où l'on a l'impression que les coulures sortent directement des cheveux. En revanche, quand on remet les traces à leur vraie place, sur un linge épousant les formes du corps, elles sont anatomiquement justes. (voir ce site)

L'image, quant à elle, est orthogonale, homogène et sans distorsion ; c'est-à-dire quelle se comporte comme une projection perpendiculaire au support à la manière d'une diapositive projetée sur un écran absolument plan. Quand je dis "absolument plan", je veux dire sans le moindre pli même superficiel. Pour obtenir cette planéité, il faut que le linge soit tendu sur un châssis à la manière d'une toile à peindre. En effet, mes essais montrent que le moindre pli, le moindre froissement à la surface du tissu provoque une discontinuité de l'image ; or celle-ci est parfaitement homogène.

Ces deux positions contradictoires pour les traces de sang et pour l'image n'induisent qu'une seule possibilité : les deux traces furent faites l'une après l'autre selon des techniques adaptées aux caractéristiques de chacune d'elles. L'une de ces deux positions (plane et tendue) oblige à penser qu'elle fut tout sauf naturelle. C'est, selon moi, la preuve évidente d'une action volontaire et c'est l'argument le plus fortement opposable à la thèse de la formation de l'image par phénomène naturel.

 

2 - Les traces de flagellation sur l'arrière des jambes :

Une autre caractéristique que personne à ma connaissance n'a relevée me semble aller clairement elle aussi dans le sens d'une fabrication artisanale et non d'un phénomène naturel : l'arrière des cuisses et les mollets de l'homme présentent des traces de flagellation imprimées sur le tissu. A première vue, rien d'anormal mais certains détracteurs du suaire ont très justement fait remarquer que les jambes de l'homme sont plus longues sur l'image de face que sur l'image arrière. Des chercheurs ont alors pu démontrer (dessin à l'appui) que si le corps avait gardé les jambes légèrement fléchies à cause de la position sur la croix figée par la raideur cadavérique, cette erreur apparente de l'image pouvait alors être comprise comme un détail très convaincant par rapport à la réalité physiologique d'une crucifixion (voir ce site). Mon problème est que si les jambes étaient fléchies, elles ne pouvaient toucher le linge par le dessous et que, dans ces conditions, on ne voit pas très bien comment les cuisses et les mollets auraient pu y déposer des marques de flagellation par contact. Il y a cependant selon moi une autre explication que je développe plus bas.

3 - Pas de trace de pression sur l'arrière du corps :

Si l'image s'est formée à partir du corps à l'intérieur du tombeau, on devrait pouvoir observer des traces de compression de la chair aplatie contre la table de pierre sur laquelle était couché le cadavre. Cette compression semble effectivement perceptible sur les traces de flagellation mais rien de tout cela sur l'image. A l'emplacement des fesses et du dos, l'effet tridimensionnel présente les mêmes caractéristiques que partout ailleurs. En d'autres termes, sur l'arrière du corps, la chair semble s'être aplatie pour le sang mais pas pour l'image qui est restée parfaitement tridimensionnelle suggérant là encore une fabrication intentionnelle et différente pour les deux types de traces.

4 - Les cheveux pendent verticalement et sont marqués sur le linge :

Le personnage a des cheveux qui tombent comme s'il se tenait debout. Or, si le cadavre était placé horizontalement, ses cheveux auraient dû tomber pour n'apparaître qu'à l'arrière en contact direct avec le linge et sans effet 3D mais il n'en est rien. D'autre part, si ce qui a marqué l'image émanait du corps, pourquoi les cheveux auraient-ils eux aussi imprimé leur empreinte sur le linge ?

5 - L'anomalie du crâne tronqué :

J'ai découvert dans un forum une discussion au sujet du crâne de l'homme du suaire qui semble tronqué. Il s'agit là en effet d'une erreur de proportion courante que font tous les dessinateurs débutants. Ceux qui font cette constatation en déduisent qu'une telle anomalie prouve que l'image a été peinte. En effet l'homme du suaire a bien le crâne trop court quand on le mesure à partir de l'implantation des cheveux. Cela veut-il dire pour autant que l'image a été peinte et de surcroît par un artiste débutant ? C'est aller un peu vite en besogne.

Il est vrai que si l'on défend la thèse de l'image peinte ou obtenue à partir d'un bas relief, cette erreur peut devenir la preuve de l'inexpérience du faussaire et, par conséquent, d'un travail de main d'homme. Comme on peut s'en douter, loin de moi l'idée de remettre en cause l'intervention humaine pour cette relique mais il y a juste un problème sur l'interprétation des causes de "l'erreur de proportion". Si notre faussaire a utilisé la technique que je décris plus bas (linge tendu horizontalement au dessus d'une demi-statue moulée sur le corps d'un cadavre de crucifié avec cheveux remodelés) cette "erreur de proportion" pourrait bien se transformer en nouvelle pièce à conviction pour confirmer ma théorie.

Certains sindonologues qui ont étudié l'aspect tridimensionnel de l'image ont très justement fait remarquer que rien du corps ou de la statue ne s'était marqué sur le linge au delà de 3,5 cm de distance. Si, comme je l'imagine, l'image s'est formée sur le linge tendu au dessus d'une demi-statue moulée sur nature, compte tenu de l'éloignement déterminé par le bout du nez et du menton barbu, le crâne ne pouvait se marquer que dans la limite de distance imposée par sa courbure qui commence dès la ligne d'implantation capillaire, soit à environ 2 ou 3 cm au dessus du front. Ainsi cette "erreur de peintre débutant" pourait n'être qu'une conséquence de la technique employée par le faussaire. Quand on voit l'absolue justesse des proportions, de l'anatomie et de l'expression de l'homme du suaire, il est évident qu'on se trouve soit face à l'œuvre d'un très grand peintre ou sculpteur, fin connaisseur de l'anatomie humaine et n'ayant rien d'un débutant (comme il en existait peu au 1er siècle et aucun au début du XIVè) ou devant un moulage exécuté sur le corps d'un crucifié dont le haut du crâne, à cause de la technique "d'impression" de l'image et peut-être aussi à cause des cheveux rajoutés par modelage, n'a pu apparaître sur l'image. Vous pouvez voir sur [ce montage] la superposition du visage d'un homme de type sémite (la longueur et la forme caractéristique du nez étant déterminantes) sur l'image du suaire. Tout correspond parfaitement sauf bien entendu le haut du crâne.


6 - Les leptons :

Certains ont voulu voir des pièces de monnaie placées sur les yeux du cadavre. Ils y ont même reconnu des Leptons caractéristiques de la période pendant laquelle Pons Pilate fut Procurateur de Judée. Personnellement, j'ai bien regardé les photographies et je n'ai pas été convaincu. Néanmoins, si des piécettes de bronze furent bien placées sur les yeux de l'homme et que le processus qui a bruni la couche d'impuretés n'a pas traversé l'épaisseur des taches de sang, on ne voit pas très bien comment ces Leptons auraient pu se retrouver inscrits sur le linge.

La couche "d'impuretés"

Rogers argumente beaucoup pour expliquer comment la couche d'impuretés aurait pu se former sur les deux faces du linge. Son explication est très intéressante mais elle sollicite essentiellement le hasard. Il fait appel à Pline pour expliquer la présence d'amidon pour faciliter le tissage et de saponine pour le lavage. Ces deux substances mélangées à d'autres impuretés se seraient combinées pour former des sucres réducteurs complexes qui auraient ainsi formé une couche sensible à la chaleur ou aux dégagements d'amines provenant du corps. Si la fabrication de cette relique fut préméditée comme je le pense par les alliés politiques de Jésus, le faussaire, qui connaissait très exactement la méthode qu'il comptait mettre en œuvre, avait tout le loisir de préparer la toile pour qu'elle reçoive l'image dans des conditions optimales. Plus besoin du tisserand et de son amidon mal rincé !

Les repeints du sang

Une image un peu trop présentable :

J'ai toujours été gêné par l'aspect "propret" du suaire. Si Jésus a subi la flagellation romaine et le couronnement d'épines avant de se rendre au lieu de sa crucifixion, j'imagine aisément que son corps devait être couvert de sang formant des taches plus ou moins étalées. Sans imaginer que les ruissellements étaient aussi abondants que ce que montre le complaisant film de Mel Gibson, le vrai Jésus devait quand même ressembler plus à cela qu'au cadavre très "présentable" du suaire. Le linge ne porte en effet que les traces "utiles", des coulures modérées et bien nettes sans aucune salissure qui aurait pu le faire ressembler à un tablier de boucher à la manière du suaire d'Oviedo.
 
Pourquoi ne retrouve-t-on pas de souillures inesthétiques en dehors des traces bien nettes de coulures ou simplement des traces infimes seulement perceptibles au microscope  ? Comme si ces coulures s'étaient faites sans qu'on y touche afin qu'elles conservent leur netteté. Comme si ces coulures (notamment au niveau de la tête) avaient sagement cessé de s'écouler pour laisser le visage bien propre. Comme si Jésus n'avait pas eu la possibilité de s'essuyer le front et les yeux avant qu'on lui cloue les poignets, étalant ainsi du sang sur son visage. Comme si son corps était resté "propre" avec seulement des coulures non étalées et des impacts de flagrum sans écoulement. Comment a-t-on pu déclouer puis déplacer le corps jusqu'au tombeau sans étaler et au moins partiellement détruire les traces d'écoulement ? J'avoue que ces questions restent pour moi sans réponse satisfaisante par rapport au scénario que je développe. Bien entendu tout ceci sent la fabrication artisanale à plein nez mais si c'est bien le cadavre de Jésus qu'on a utilisé pour fabriquer la relique, cette propreté me semble difficile à expliquer. 

Comme je n'ai pas l'intention de m'arrêter en si bon chemin (et pour si peu !) je vais donc tenter une explication. Si cette relique est bien du 1er siècle et que, comme je le pense, elle n'a pu être fabriquée qu'en étant mûrement préméditée, les hommes qui détachèrent le corps et le portèrent jusqu'au tombeau, conscients qu'il ne fallait surtout pas endommager les traces de sang, auraient alors tout fait pour les préserver. La raideur cadavérique aurait pu favoriser le transport sans que le corps soit autant manipulé que s'il avait été flasque. Y eut-il un nettoyage des "souillures indésirables" à l'intérieur du tombeau avant qu'on installe le cadavre dans le linceul ? Je me rends bien compte que j'entame ici un tout autre débat dont je n'ai aucune chance de trouver les réponses. Ce point fait un peu digression dans mon développement mais il méritait d'être soulevé. 

La justesse anatomique des traces de sang :

Reprenons donc le fil de notre histoire au moment de l'enlèvement du linceul de la surface du corps nettoyé ou non. Quand on sort Jésus du linceul, les principales coulures se sont décalquées sur le linge. Les traces ainsi obtenues ne sont ni très régulières ni très nombreuses. On aperçoit quelques décalques de coulures et de caillots sur les bras et sur le front, des écoulements de sang liquide sous les pieds et les reins et, ça et là, des traces de flagellation pas toujours très claires ni très nombreuses. Il faudra "retoucher" ces traces afin qu'elles deviennent plus lisibles et convaincantes. On pourrait commencer à les retoucher immédiatement mais ce n'est pas une priorité. En effet, comment disposer avec précision certaines traces en l'absence d'image ? Et puis, par cette chaleur, le corps va bientôt se décomposer, il faut se dépêcher d'en faire un moulage.
 
Une fois le moule terminé, quand on extrait le corps de sa gangue de plâtre, les dernières traces de sang qui ne s’étaient pas collées au linge restent incrustées à la surface du plâtre qui conserve ainsi leurs formes et leurs positions. Le faussaire pourra utiliser ses marques comme modèle pour préciser certaines parties imprécises ou manquantes sur le linceul. Le foisonnement des traces sanguines anatomiquement exactes qui au XXè siècle fera la crédibilité du linceul est dû au fait que le peintre n’a pas eu à inventer ces traces. Il les a obtenues par contact entre le linge et le corps et les a ensuite retouchées là et seulement là où c’était nécessaire. Pour conserver une grande justesse, il a pu observer le cadavre lui-même mais il a aussi pu se baser sur les traces incrustées dans le moule. Il n’a rien eu à inventer et n’avait d’ailleurs aucun intérêt à le faire.
 
Passons pour l'instant l'étape de la fabrication de l'image sur laquelle nous allons bientôt nous étendre afin de continuer notre réflexion sur les repeints de sang.
 
Une fois les deux images "imprimées" sur le linge, le faussaire entreprend les retouches avec le sang soutiré au cadavre. En effet, si, comme certains sindonologues l'affirment, de la bilirubine est bien présente dans le sang du linceul, c'est que les repeints ne purent être faits qu'avec le sang du supplicié. Il commence par retoucher certaines zones moins denses ou manquantes des caillots et des coulures. Pour bénéficier d'un linge plus souple, il avait choisi un tissage en chevrons et comme il faisait partie de ceux qui aidèrent à mettre Jésus au tombeau, le faussaire avait lui-même veillé à appliquer le linge soigneusement aux endroits les plus ensanglantés du cadavre en évitant autant que possible de laisser des plis. L’arrachage un peu aléatoire du linge, le fait que certaines coulures n’étaient pas assez liquides pour s’imprégner dans le tissu et les quelques plis restants malgré les précautions prises rendaient un aspect général peu satisfaisant. Les traces de flagellation par exemple n'étaient pas toutes présentes. Certaines coulures des bras ou du coup de lance étaient discontinues. Il n’est pas certain que le faussaire avait prévu des retouches dans son projet initial, mais aux vues du résultat, cette solution s’était imposée.

Pour réaliser ses retouches, le peintre n'utilise pas de pinceau ; il plonge un bâtonnet dans le sang, une goutte se forme à son extrémité et il la dépose sur les décalques existants en l’étalant doucement pour combler les vides là où c'est nécessaire. Aux endroits où les caillots se sont décalqués, le tissu est déjà "stoppé" (un terme de peintre en bâtiment qui signifie rendu imperméable par une première couche imprégnée dans le support) et le sang qui sert aux retouches est lui-même plutôt épais, cette particularité fait que les repeints ne pénètrent pas dans la toile. Les impacts de flagellation sont appliqués par tamponnage à l'aide d'un petit outil en forme de double balle de plomb. Comme certaines de ces plaies de flagellation s’étaient pas imprimées, le faussaire apporte un soin tout particulier à en rajouter partout où elles manquent et notamment derrière les cuisses et les mollets afin s’approcher le plus possible d'un aspect réaliste.
 
2000 ans plus tard, cette méthode de retouche ne permettra pas de déceler le moindre coup de pinceau. L'emploi d'un sang visqueux qui s'étale sans pénétrer dans le tissu déjà stoppé enlèvera aux caillots et aux coulures toutes traces d'arrachage. Certains appelleront cela "impression-retrait sans contact". Cet étrange concept deviendra pour beaucoup la preuve du miracle ! Comme cette anomalie est inexplicable, c’est que le corps a dû disparaître dans un flash de lumière aveuglante provocant l'apparition miraculeuse de l'image, un dérèglement de l'horloge radioactive et la stupeur des gardiens du tombeau. On dira aussi que la présence de bilirubine dans le sang est la preuve que ce n'est pas un faussaire qui a pu peindre les taches au moyen-âge car où aurait-il déniché un tel sang et pourquoi se serait-il donné cette peine ? Si en effet la présence de cette substance semble bien invalider l'action d'un faussaire du XIVè siècle, elle paraît en revanche suggérer l'emploi du cadavre de Jésus !

La méthode que je décris expliquerait tout ce qui suit :
 
- La justesse anatomique des traces de sang

- La relative non-pénétration du sang au niveau des caillots et des coulures

- L'absence de traces d'arrachage sur les caillots et les coulures

- La précision et la répartition homogène des traces de flagellations partiellement repeintes

- Leur présence sur l'arrière des cuisses et des mollets

- Le sang humain (et non animal) contenant de la bilirubine.

- Le fait qu'on ait eu du sang sur le linge avant que n'y apparaisse l'image.

Tous ces détails ne peuvent s'expliquer que si c'est bien le cadavre d'un crucifié du 1er siècle qui fut utilisé par le faussaire. Dans la mesure où cette relique était destinée à être montrée aux autorités qui avaient connu Jésus, pourquoi et comment aurait-on utilisé le corps de quelqu'un d'autre pour la fabriquer ? Si l'on n'admet pas cela, le linceul redevient un objet impossible à fabriquer.

La fluidité du sang :

On objectera à juste titre que pour que cette technique soit possible, il aurait fallu que le sang restât liquide pendant plusieurs jours. C'est vrai ! Cinq ou six au minimum. Deux nuits et un jour dans le tombeau, une journée pour faire le moule, une autre pour mouler l'avant et "l'imprimer" sur le linge et encore une autre pour faire la même chose avec l'arrière. Si l'on considère que le faussaire va se reposer pour entreprendre les retouches le lendemain matin et qu'il met au moins la journée pour achever le travail (ce qui me parait court), on obtient un temps de cinq jours et demi. Bien sûr ce temps n'est possible qu'à condition que tout le dispositif ait été préparé à l'avance (table, plâtre, mortier, châssis etc…) et qu'aucune anicroche ne soit venue rallonger la durée de fabrication.
 
Je ne suis pas médecin mais il semble possible de garder du sang liquide pendant plusieurs jours. En effet, (voir ce site) le sang d'un cadavre, tant qu'il reste à l'intérieur du corps, conserve semble-t-il sa fluidité. Si donc le faussaire soutira du sang au cadavre au bout de plusieurs jours, il semble bien qu'il pouvait encore obtenir du sang liquide.

Toute cette réflexion sur l'état du sang après la mort n'a de sens que si les taches sont toutes effectivement du même sang et pour affirmer cela, les sindonologues se fondent sur son rhésus AB. D'autres scientifiques affirment que n'importe quel sang ancien devient de rhésus AB avec le temps. Cette réalité relativise beaucoup l'affirmation sindonologique du sang unique partout sur le suaire. Le faussaire a tout bonnement pu prendre un autre sang pour finir le travail, autre sang qui, avec le temps, est passé au même rhésus que celui de Jésus. Un examen génétique serait assurément plus parlant et permettrait enfin de savoir vraiment de quoi l'on parle. Quant à sa rougeur excessive, le faussaire a très bien pu l'agrémenter d'un peu de colorant au moment des retouches ou quelqu'un d'autre beaucoup plus tard afin de rafraîchir la relique.
 
Une autre question pourrait s'adresser aux scientifiques qui ont observé ou observeront un jour la relique. On sait que l'image n'apparaît pas sous les taches de sang mais a-t-il été précisé sous lesquelles ? Si c'est sous les caillots et sous les coulures, cela s'explique fort bien car ces traces se formèrent dans le tombeau, mais a-t-on regardé sous les impacts de flagellation des mollets et de l'arrière des cuisses ? Comme je crois que ces traces ont été rajoutées après l'apparition de l'image ce pourrait être un excellent moyen de vérifier mon hypothèse. On pourrait aussi vérifier si toutes les traces sont du même sang. Si, en effet, les retouches ont été faites plus tard, rien n'obligeait le faussaire à utiliser le même sang que celui des décalques obtenus par contact dans le tombeau.

La fabrication de l'image

 

Le moule :

Le cadavre ayant retrouvé sa souplesse, ses jambes sont remises droites et on réalise un moule en plâtre en deux coquilles, une pour le devant et l'autre pour l'arrière. Moula-t-on le corps en laissant les bras dans la position que nous leur connaissons, en acceptant la difficulté de réaliser un tel moulage ou disposa-t-on les bras le long du corps. Dans ce cas le plan de joint devient rectiligne et très simple à réaliser. Il suffit ensuite, le matériau utilisé pour le moulage étant malléable, de replacer les bras en position croisée au niveau des poignets. Ce procédé aurait permis un moulage très simple avec un plan de joint totalement rectiligne et il pourrait même expliquer la disproportion des bras, qui sur l'image, paraissent effectivement un peu longs. Ce procédé offre également la possibilité de fabriquer deux demi-statues dont la base plane permet de les faire reposer sur une table ou sur le sol sans qu'elles ne se déforment. Nous reviendrons un peu plus bas sur les différentes techniques de moulage de la statue. Elles jouent un rôle important dans la compréhension du processus de fabrication de l'image. Vous pouvez accéder directement à cette description en cliquant ici : Technique de moulage

Ajustement du "corps" et des traces de sang :

J'imagine parfaitement la demi-statue posée au sol ou sur une table avec au-dessus d'elle le linceul tendu sur un châssis rectangulaire en bois. Le linge est placé à quelques millimètres de la statue sans jamais entrer en contact avec elle. Cela n'a pas dû être facile de replacer les deux demi-corps exactement au bon endroit par rapport aux taches déjà présentes sur le linge. Si ce sont bien des gaz aminés qui ont provoqué le brunissement de l'image, il a fallu que l'opération se déroule dans un endroit absolument exempt de courant d'air afin de garantir la netteté et une parfaite orthogonalité.

Le problème des jambes :

Comme nous l'avons déjà vu plus haut les jambes sont plus longues devant que derrière. Cette anomalie s'explique très bien si l'on considère que le corps dans le tombeau avait conservé les jambes pliées à cause de la raideur cadavérique. Oui, mais nous avons vu que selon moi, le corps redevenu souple fut moulé droit. Comment expliquer alors la différence de longueur entre l'avant et l'arrière des jambes ? La réponse est simple. Il fallait placer le corps en concordance exact avec les traces sanguines or, les forts écoulements de sang liquide provenant de la plante des pieds s'étant formés dans le tombeau, les jambes à ce moment-là étaient pliées. Quand le faussaire superposa la demi-statue arrière au linceul, les jambes se retrouvèrent trop longues. Impossible de faire correspondre les pieds et la tache de sang. Il dut avoir recours à un artifice aussi simple que radicale. En utilisant un fil à découper la terre, il tronçonna les jambes en un ou deux endroits juste ce qu'il fallait pour rétablir la correspondance sans trop altérer les proportions. Avec cette explication, le dessin d'Isabelle Piczek redeviendrait exacte mais il faut admettre une fois encore que les traces de flagellation des cuisses et des mollets furent toutes rajoutées à la main.

Les conditions pour que cet objet soit réalisable :

L'ingéniosité déployée et les connaissances nécessaires pour fabriquer un tel objet dépasse très largement le savoir scientifique et surtout historique d'un faussaire même génial du 14ème siècle. Point n'est besoin de carbone 14 pour admettre cette évidence. En revanche, la théorie que j'ai imaginée au 1er siècle est envisageable mais à certaines conditions seulement :

- Il faut posséder le cadavre d'un homme de type sémite au physique charismatique,

- Flagellé avec un flagrum Romain,

- Couronné d'épines,

- Vraiment crucifié (et notamment avec des clous dans les poignets),

- Mort en croix prématurément sans avoir les jambes brisées,

- Percé au cœur après sa mort,

- Possédant un sang contenant de la bilirubine (substance inconnue avant le XXè siècle)

- Enseveli dans un linceul identique à ceux qu'utilisaient les Juifs au 1er siècle,

- N'ayant pas séjourné plus d'une trentaine d'heures dans son linceul


Toutes ces conditions sont indispensables pour que la fabrication de cet objet ait été possible et, à part travailler au premier siècle à partir du corps de Jésus en personne, on ne voit pas très bien qui d'autre aurait pu être cet homme ni pourquoi le faussaire se serait évertué à recréer tous ces détails dont certains ne pouvaient être connus que par les contemporains et d'autres seulement identifiables par des scientifiques du XXè siècle et surtout pas par le faussaire lui-même (image en négatif, tridimensionnalité, bilirubine du sang . . .)
 
Le caractère indiscutablement orthogonal et non distordu de l'image s'opposant à la distorsion des taches de sang interdit tout phénomène naturel pour expliquer sa formation. Cette contradiction de forme entre l'image et les traces de sang prouve qu'on dut donner au moins deux positions différentes au linge au cours du processus dont l'une (plane et tendue au-dessus du corps) est indéfendable avec l'hypothèse du phénomène naturel de Rogers.

Chaleur ou réaction chimique ? :

Pour le professeur Rogers, la chaleur ne pouvait pas être la cause de la réaction de Maillard qui forma l'image. Au-dessus de 150°, c'est la cellulose des fibres de lin qui se teinte et l'observation montre que ce n'est pas le cas. En dessous de 100°, la réaction de Maillard ne se fait plus que très lentement. 120° serait la température idéale mais il faudrait imaginer qu'elle resta constante et homogène partout sur le corps (ou la statue), ce qui lui semblait impossible. De plus, comme l'utilisation d'une statue ne pouvait selon lui être envisagée qu'au moyen-âge et que le linceul n'était pas de cette époque, il écarta la chaleur comme source possible de l'image.
 
Il préférait l'hypothèse d'une réaction à froid provoquée par des amines dégagées naturellement par le cadavre. L'ammoniaque venant des poumons et s'exhalant par le nez ainsi que la putrescine et la cadavérine émanant de la peau pouvaient, selon lui, provoquer ce brunissement. Son décès intervint malheureusement avant qu'il ait eu le temps de démontrer son hypothèse. Il aurait eu cependant beaucoup de mal à prouver ce qu'il avançait compte tenu du problème insurmontable dont il était conscient. Des gaz venant au contact d'un linge déformé par le corps sur lequel il reposait comme le prouvent les traces de sang ne pouvaient aboutir à la formation d'une image nette, orthogonale et non distordue.

Quatre propositions de réflexion :


1 - Un linge préparé était le seul moyen d'obtenir à coup sûr une bonne image.
 

2 - Seul un linge plan et tendu permet la formation d'une image orthogonale et non distordue.
 

3 - Les émanations d'amines froides ne permettent pas la netteté mais peuvent expliquer la tridimensionnalité et l'orthogonalité.
 

4 - La chaleur seule (sans amine) à moins qu'elle ne soit focalisée par un système optique (inexistant au 1er siècle et encore beaucoup trop balbutiant au 14ème), ne se déplace pas perpendiculairement au linge mais perpendiculairement à la surface émettant le rayonnement. Cela veut dire qu'elle rayonne en tout sens comme les rayons du soleil interdisant bien entendu l'orthogonalité.
 
De plus l'intensité de la chaleur diminuant d'une valeur inversement proportionnelle au carré de la distance, cela signifie que si la statue est à 120° maximum à sa surface, le linge ne recevrait plus assez de chaleur au bout de quelques millimètres de distance pour permettre le processus de brunissement. Cela interdirait la tridimensionnalité. On voit que l'orthogonalité et la tridimensionnalité qui sont pourtant des caractéristiques reconnues et indiscutables du linceul sont incompatibles avec une action exclusive de la chaleur. Je suis donc d'accord avec Rogers pour dire que la chaleur seule ne peut expliquer le processus.

Des amines combinées à de la chaleur :     ?

Si maintenant on admet que le faussaire a tendu le linge au-dessus d'une statue faite d'un matériau chauffé ou chauffant dégageant des amines chaudes, le processus pourrait expliquer un certain nombre de choses. Non seulement des amines chaudes favoriseraient la réaction de Maillard mais elles pourraient expliquer la tridimensionnalité, la netteté et la double superficialité :

Le dégagement d'amines chaudes à partir d'un moulage a pu assurer la tridimensionnalité ainsi qu'une certaine netteté de l'image. A haute température, la réaction de Maillard se fait beaucoup plus rapidement.

Le phénomène tridimensionnel peut donc avoir être provoqué non par la quantité d'amines touchant le linge en fonction de la distance, mais par leur efficacité liée à leur chaleur variable avec la distance.

La netteté quant à elle s’est créée grâce à la plus grande efficacité de la réaction de Maillard dans les zones les plus rapprochées du linge. Cette accélération du processus alliée à une chaleur avoisinant peut-être les 120° a pu provoquer une sorte de saturation donnant la netteté des zones les plus rapprochées.
 
On voit que la combinaison entre chaleur et dégagement gazeux pourrait expliquer les caractéristiques fondamentales du linceul comme la netteté et la tridimensionnalité mais une question se pose : comment le faussaire a-t-il pu obtenir des demi-statues chaudes dégageant des gaz aminés ?

Envisageons trois techniques de moulage


Comme nous l'avons vu plus haut, le moule était probablement fait de deux coquilles réunies par un plan de joint rectiligne. A partir de ce type de moule, les techniques pour obtenir une statue ou deux demi-statues sont diverses et ont leur importance. Examiner différents procédés pour éliminer les plus improbables nous permettra peut-être, en réduisant les possibilités, de nous approcher du vrai :

1 - Par coulée pleine :

Une coulée pleine consiste à remplir d'une substance liquide un moule fermé pour ne démouler la statue qu'une fois qu'elle a durci. Cette technique implique qu'on doive utiliser un matériau liquide durcissant par refroidissement comme du métal ou de la cire ou en prenant comme du plâtre ou du ciment. Cette technique n'aurait pas permis un démoulage correct avec un moule simple comme celui décrit ci-dessus. Un tel moule est plein de contre-dépouilles qui interdisent le démoulage d'une statue rigide. Un moule par coulée pleine aurait nécessité l'utilisation d'un moule à clés de fabrication beaucoup plus complexe. Un tel moule se compose de plusieurs parties en plâtre emboîtées et maintenues entre elles par une chape elle-même en plâtre. Une coulée pleine interdit un démoulage avant la prise définitive du matériau coulé. C'est un inconvénient majeur si l'on considère que c'est peut-être le pic thermique de la prise qui devait provoquer les dégagements d'amines chaudes. En effet, si la prise doit avoir lieu avant le démoulage, plus question de compter sur un second pic thermique après démoulage. Pour ces raisons ce procédé me semble le moins probable.

2 - En barbotine :

Comme le moule était en plâtre, on peut envisager un moulage en barbotine comme pour la porcelaine. La barbotine est une terre glaise fortement diluée jusqu'à la rendre liquide. Pour fabriquer une petite sculpture ou une théière, on remplit un moule en plâtre avec ce liquide et on attend un peu. Le plâtre absorbe une partie de l'eau de la barbotine en contact avec sa surface. Il suffit alors de renverser le moule pour vider la barbotine encore liquide. Ne reste plus dans le moule qu'une fine couche de terre pâteuse assez rigide pour être démoulée. Pour une statue grandeur nature, on pouvait difficilement remplir le moule de barbotine (trop lourd et trop volumineux) mais on aurait pu enduire à la main ou projeter la barbotine par couches successives. La technique aurait dans ce cas ressemblée à celle utilisée par les confiseurs qui fabriquent une cocote en chocolat ou les œufs de pâques . . . Chaque demi-statue ainsi obtenue n'est qu'une coque vide à l'épaisseur plus ou moins régulière. Difficile avec ce procédé d'obtenir une épaisseur importante suffisamment solide pour ne pas se briser au démoulage. Pour que cette technique fonctionne, il faut que le moule en plâtre soit sec afin d'absorber l'eau de la barbotine. Cet impératif aurait considérablement augmenté le temps de fabrication. Comme l'intérêt d'une statue aussi fine et fragile ne me semble pas se justifier, je ne pense pas non plus que ce soit cette technique qui fut utilisée par notre faussaire. Par ailleurs, la barbotine n'étant que de la terre, point de pic thermique possible.

3 - Par estampage :

Un estampage peut se pratiquer de deux façons : soit en couche, soit en plein.

En couche, on peut le comparer à la technique qui permet d'étaler une pâte à tarte au fond d'un moule. On étale d'abord la pâte au rouleau puis on l'applique au fond du moule en essayant de maintenir une épaisseur régulière. Le résultat final peut être comparé à la barbotine décrite ci dessus mais le mouleur peut choisir n'importe quel matériau malléable et en contrôler facilement l'épaisseur.

En plein, il suffit de remplir le moule avec une pâte et de démouler en retournant exactement comme un pâté de sable. On verra que ces deux techniques présentent chacune de réels avantages.

Deux options :

Comme on l'a vu, un estampage se démoule facilement grâce à la consistance pâteuse du matériau moulé. Il permet d'obtenir deux demi-statues parfaitement adaptées à la fabrication de chaque image recto et verso. Il permet de démouler avant que le matériau n'ait commencé sa prise. Il permet de mouler n'importe quel matériau pourvu qu'il soit malléable. Il aurait enfin permis de mouler les bras le long du corps avant de les replacer dans la bonne position après démoulage. J'ai donc retenu l'estampage comme technique de moulage la plus probable mais nous avons vu qu'il peut être en couche ou en plein. Voyons si une de ces deux variantes serait plus adaptée aux besoins de notre faussaire. Rappelons ici que selon moi, la statue devait pouvoir atteindre une certaine température relativement élevée pour que la réaction de Maillard se fasse dans des conditions particulières.

Chauffage par pic thermique :

J'ai décrit un peu plus haut qu'une montée en température provoquée par le pic thermique de la prise d'un mortier pourrait expliquer la température de la demi-statue. Avec une demi-statue pleine ou d'une épaisseur contrôlée, les substances que contient son matériau se dégageant de la matière pendant la chauffe pouvaient déclencher la réaction de Maillard sur le linge.

Cette solution a le mérite d'être simple mais présente des inconvénients :

- Je ne suis pas du tout certain qu'un pic thermique dû à la prise d'un mortier puisse atteindre une température aussi élevée. Pour que les gaz provoquent la réaction de Maillard, ce n'est probablement pas la peine qu'ils montent à 120° mais néanmoins le pic thermique du plâtre qui est le plus élevé que je connaisse est beaucoup plus bas que ça.

- La répartition très irrégulière des masses dans le cas d'une demie statue pleine créerait une irrégularité équivalente des températures et des quantités d'amines dégagées. La réaction de Maillard serait alors inégale suivant les endroits. Le mouleur pourrait peut-être s'arranger pour répartir la matière de façon harmonieuse afin de garantir une chaleur à peu près régulière sur toute la surface mais cette régularité me semble très utopique.

- La grande quantité d'eau contenue dans la demi-statue mouillerait inévitablement le linge par de la vapeur d'eau qui stopperait la réaction de Maillard et laisserait même des auréoles sur le tissu.

Toutes ces remarques me font douter que le faussaire ait pu avoir recours à cette technique. Ou alors son mélange ne contenait pas d'eau.

Par chauffage interne :

Deux demi-statues obtenues par estampage d'une couche relativement fine seraient creuses. L'espace interne permettrait d'accumuler à l'intérieur une source de chaleur comme des braises.

- La température pourrait alors monter jusqu'au niveau souhaité. Ce n'est qu'une question de dosage de la quantité de braises.

- En revanche, il semble tout aussi difficile d'obtenir une température régulière sur toute la surface.

- On peut imaginer un estampage fait avec un matériau poreux qui laisserait s'échapper des gaz aminés provenant soit du matériau lui-même, soit d'une substance mélangée avec les braises et qui s'infiltrerait à travers les porosités de la matière mais j'ai beaucoup de mal à l'imaginer.

Les cheveux :

Sur le vrai cadavre bien entendu les cheveux seraient tombés en arrière et ne seraient pas apparus sur l'image avant. Si l'image fut créée à partir d'une statue, il était facile de remodeler des cheveux pendant verticalement avec le même matériau que la statue. Cela m'amène donc à penser que ce matériau devait être plutôt malléable et tend à renforcer ma conviction d'une statue estampée.

En résumé, on voit que chacune de ces techniques d'estampage présentent des avantages et des inconvénients. J'espère donc que ma description permettra à un spécialiste des techniques anciennes de moulage d'identifier le matériau de la statue.

Tout ce que pourrait expliquer mon hypothèse    


Ainsi, en combinant les idées de Rogers à la planéité du linge sur lequel une réaction de Maillart se retrouverait provoquée par des vapeurs d'amines chaudes émanant d'un moulage de Jésus sur son propre linceul, on pourrait expliquer :

- La planéité de l’image,

- l'orthogonalité,

- la non-distorsion,

- la tridimensionnalité,

- la haute résolution,

- la double superficialité,

- la non-concordance partielle de l'image et des empreintes, (au niveau de la tête)

- le fait que les taches de sang aient été faites avant l'image, (du moins sous les caillots)

- La verticalité et le marquage des cheveux sur l'image, (remodelés sur la statue)

- La présence de traces de flagellation sur l'arrière des jambes,

- La longueur variable des jambes

- La justesse historique et anatomique de tout ce qui peut être observé,

- L'apparition du voile d'Édesse un peu après l'an 30

Il reste peu de questions sans réponse :

1 - L'apparition des leptons sur l'image :

Si des leptons de bronze furent bien placés sur les yeux, on ne voit pas très bien pourquoi le faussaire aurait fait cela ni comment ces piécettes seraient apparues sur l'image à moins de faire parti du moulage mais ça ne tient pas debout. Pourquoi en effet cet habile artisan se serait-il embêté à mouler ces deux piécettes compte tenu de la difficulté technique que cela représente et alors que ces deux petits détails sont invisibles sur l'image ? On peut aussi envisager que ceux qui ont vu des leptons n'ont fait que les inventer. Personnellement, je n'ai jamais trouvé cette hypothèse très convaincante.

2 - En quoi la statue pouvait-elle être faite ? :

En fait, toute la question est là. Elle pouvait par exemple être faite d'un matériau malléable à la manière d'une terre glaise et possédant la propriété de chauffer pendant la prise en dégageant des amines sans vapeur d'eau excessive. A l'heure actuelle, je n'ai aucune idée de ce que pouvait être cette substance mais on peut y réfléchir :

Voyons du côté de l'aragonite du travertin : 

On a retrouvé des traces d'aragonite sur le visage, les mains, les jambes et les pieds de l'homme du suaire. Des chercheurs constatant que les villes du moyen orient sont faites en grande partie d'un marbre calcaire appelé Travertin lui-même composé d'Aragonite (un carbonate de calcium) en ont déduit que ce minéral avait pu se déposer sur le linge à partir des salissures présentes sur la peau de Jésus. Les évangiles racontent en effet qu'en portant sa croix il tomba à plusieurs reprises sur les genoux et sur le visage dans les rues de la ville.

La tentative d'explication est séduisante. Cependant, comme tout carbonate de calcium, il suffit de chauffer l'aragonite pour obtenir de la chaux. On peut aussi mélanger à la chaux différents matériaux pour en faire un mortier ou un béton. Le fameux béton romain par exemple était fait entre autres ingrédients de chaux et de pouzzolane ou de débris de terre cuite. Pourquoi, dès lors, ne pas imaginer que la statue aurait pu être faite d'un mortier à la chaux d'aragonite ou à la chaux mélangée à de l'aragonite. Mon idée vaut ce qu'elle vaut mais avant d'avoir démontré qu'elle ne tient pas la route, elle vaut bien l'hypothèse des salissures de la peau. Rappelons que les Évangiles disent que les soldats romains se disputèrent aux dés la tunique sans couture de Jésus une fois qu'elle lui eut été ôtée. S'il portait sa tunique qui devait descendre jusqu'aux pieds pendant qu'il portait sa croix, il n'est pas du tout certain que de la poussière aurait pu adhérer à ses genoux en quantité suffisante pour être encore perceptible 2000 ans plus tard à la surface du linge. Le contact direct avec une statue encore humide contenant de l'aragonite chaude en train de prendre aurait en revanche déposé cette substance en quantité suffisante et suffisamment accrochée aux fibres pour parvenir jusqu'à nous.

Bien sûr cette tentative d'identification du mélange par l'aragonite n'est qu'une supposition. Beaucoup d'autres matériaux auraient pu servir à mouler cette statue et notamment des substances organiques ou ammoniaquées pour expliquer le dégagement d'amines. Mais d'où viendrait l'aragonite présente dans le tissu ? Peut-être en effet des salissures du corps lui-même car, après tout, cette histoire de la tunique sans couture est trop symbolique pour être totalement crédible.

Un savoir empirique serait-il la clé ? :

On peut imaginer par exemple que des artisans (potiers, mouleurs, staffeurs) qui manipulaient régulièrement cet hypothétique mortier ou béton avait depuis longtemps remarqué la propriété qu'il avait en chauffant pendant la prise de laisser des traces jaunâtres sur les tissus dont on le recouvrait pour lui conserver le plus longtemps possible sa chaleur et/ou son humidité pendant la prise. On se prend à imaginer que des artisans de l'antiquité découvrirent un jour que les formes en relief ornant la surface d'un grand vase ou d'une statue en phase de séchage s'étaient décalquées pendant la nuit sur une pièce de tissu qui avait servi à l'envelopper. On peut alors imaginer que ce phénomène connu empiriquement depuis des générations par des potiers ou des staffeurs aurait pu donner l'idée à notre faussaire de produire une image d'apparence miraculeuse sur le linceul de Jésus qu'il aurait préalablement enduit d'une substance à base de sucres. Cette supposition rendrait la technique simple et envisageable sans nous obliger à supposer un quelconque savoir scientifique incompatible avec cette époque. Un jour prochain, espérons-le, un historien des techniques anciennes lisant mon site ou se faisant les mêmes réflexions que moi aura tout-à-coup la bonne idée. Une technique connue dans l'antiquité et peut-être toujours utilisée de nos jours lui semblera susceptible de correspondre à ce qu'a pu utiliser notre faussaire et là . . .

L'image dans son époque :

Le faussaire était-il juif ? Cette religion interdit en effet la production d'images. Il ne devait pas y avoir beaucoup de juifs à cette époque qui possédaient le savoir-faire pour produire une image humaine. De plus, celui qui serait chargé de montrer le linceul aux autorités pouvait être accusé d'avoir enfreint cette loi Juive. Le danger était grand tant envers dieu que face aux autorités religieuses. Si malgré tout le faussaire était juif, il se peut que le fait de produire une sculpture par moulage ait pu lui sembler faisable vis-à-vis de Dieu surtout compte tenu de l'importance des enjeux politiques. Faire apparaître ensuite l'image sur le drap pouvait là encore sembler envisageable étant donné qu'elle apparaissait d'elle-même sur le support sans que personne n'ait eu à la tracer. Pour celui qui prendrait le risque de montrer le linceul aux prêtres et aux Romains, si l'image paraissait miraculeuse, ("Acheiropoïète" : "non faite de main d'homme" diront beaucoup plus tard les Byzantins), on ne pourrait pas la rejeter comme contraire à la loi juive ni accuser son propriétaire de l'avoir peinte. Et puis, je continue de penser que ces complices de Jésus étaient tout sauf des mystiques. Ce handicap religieux n'a pas dû leur poser de problèmes insurmontables.

Qu'est ce qui prouve que le faussaire vivait au 1er siècle ? :


- Le faussaire connaissait tout des châtiments romains et des pratiques funéraires juives.

- Il n'eut ni à peindre les coulures de sang (au plus à les retoucher) ni à sculpter ou à dessiner le corps. Il travailla selon toute vraisemblance à partir du cadavre d'un véritable crucifié comme l'atteste la multitude de détails exacts que recèle le linge et surtout si l’on considère la présence de Bilirubine dans le sang.

- Pourquoi dès lors ne pas envisager que ce supplicié qui a beaucoup souffert, fut flagellé au Flagrum, couronné d'épines, fut crucifié avec des clous (un mode de crucifixion plutôt rare à cette époque), mourut en croix en trois heures, fut percé d'un coup de lance au cœur et bénéficia d'un linceul, d'un tombeau et de complices pour fabriquer les deux images de son linceul, pourquoi donc ne pas admettre que l'homme du suaire ne peut être que Jésus ?

- Notre faussaire savait parfaitement à quel public il s'adressait : des dirigeants politiques et religieux juifs retors et soupçonneux, ennemis des idées subversives de ceux pour qui il travaillait, et des Romains pragmatiques et sans état d'âme envers tous ceux qui pouvaient remettre en cause d'une manière ou d'une autre leur autorité. Des gens qui, tous, avaient connu et condamné ce Jésus qu'ils avaient traité d'imposteur et en qui ils n'avaient absolument pas cru de son vivant.

- A aucune époque, il ne fut si indispensable de produire une preuve aussi parfaitement irréfutable ; à la fois par l'aspect miraculeux de son apparence « non faite de main d'homme » et pour son absolu justesse historique et anatomique. Ce réalisme scrupuleux et cette apparence étrange et inexplicable n'étaient non seulement plus possible mais plus nécessaire à Byzance, à Besançon ou à Lirey au 14ème siècle. Seuls une organisation juive et un faussaire contemporain des évènements ayant accès au cadavre de Jésus et devant affronter les autorités juives et romaines pour prouver la résurrection d'un homme que tous avaient connu et condamné pouvait avoir à la fois la motivation et la possibilité de produire un tel objet.

En résumé, si la théorie de la réaction de Maillard s'avère juste et si, contrairement à Rogers, on admet qu'elle fut provoquée artificiellement par un faussaire du 1er siècle disposant du cadavre de Jésus, l'énigme du St Suaire pourrait bien tomber et avec elle les derniers doutes au sujet de la résurrection d'un homme au premier siècle.
Le problème dès lors n’est plus de déterminer à quoi pouvait bien ressembler le dispositif mais quel fut le matériau de la statue et quelle fut la technique traditionnelle qui inspira cette idée au faussaire.

Résumé du dispositif en 10 points

1 - Préméditation et mise en place du dispositif bien avant l’arrestation de Jésus et préparation du linceul avec une substance à base de sucres.

2 - Intervention de Joseph d’Arimathie auprès de Pilate pour récupérer le corps et installation minutieuse du linceul sur le cadavre dans le tombeau afin que les taches de sang s’impriment le plus nettement possible sur le linge.

3 - Vol du corps dans la nuit du samedi au dimanche.

4 - Moulage du corps avec du plâtre et tirage de deux demi statues faites d'un matériau pâteux aux propriétés chimiques particulières.

5 - Fixation du linceul déjà maculé de sang tendu sur un châssis de bois et calage précis du linge sur les demi-statues afin de laisser se former l'image dans une pièce sans courant d'air.

6 - La coulée de sang des pieds positionnée un peu trop près du reste du corps à cause de la flexion des jambes dans le tombeau oblige à raccourcir les jambes de la statue arrière.

7 - Remodelage des cheveux pour qu'ils tombent le long de la tête comme si l'homme se tenait verticalement. Sans cet artifice, l'homme aurait donné l’impression d’avoir les cheveux courts. La barbe et la moustache sont elles aussi probablement remodelées compte tenu de la difficulté de mouler ces parties.

8 - Repeint de certaines traces de sang notamment pour les impacts de flagrum notamment sur les mollets et à l'arrière des cuisses qui, dans le tombeau, ne pouvaient être en contact avec le linge. Soit le faussaire utilise le sang encore liquide dans le cadavre, soit il utilise un autre sang que l'unification des rhésus en AB ne permet plus aujourd'hui d'identifier. Les scientifiques qui auront de nouveau accès à la relique devront vérifier par une analyse génétique que le sang est partout le même et surtout sur les mollets et l'arrière des cuisses. 

9 - Quel était le matériau employé par le faussaire pour fabriquer la ou les deux demi- statues ?

a - Le matériau doit pouvoir être chauffé ou mieux chauffer tout seul pendant la prise à la manière du plâtre ou de certaines résines modernes ou par un processus chimique quelconque.

b - En chauffant, il doit dégager des substances susceptibles de déclencher une réaction de Maillard (amines ?) sur une couche de sucres (elle aussi à déterminer) recouvrant les fibres les plus superficielles du linge.

c - Ces dégagements d’amines ne doivent pas contenir trop de vapeur d’eau qui pourrait, en humidifiant le linge, retarder ou empêcher la réaction de Maillard et provoquer la formation d’auréoles (inexistantes sur le linceul)

d - Ce matériau me semblerait plus adapté s’il se présentait sous la forme d’une pâte malléable qu’on pourrait ainsi estamper dans le moule. Cette consistance éviterait certains problèmes comme l’excès d’eau ou la nécessité d’attendre une prise ou un séchage partiel avant de démouler. Il permet, en donnant à la demi-statue une épaisseur régulière, de diminuer son poids et de faciliter son démoulage. Le creux ménagé à l’intérieur de la forme permettrait éventuellement d’y installer une source de chaleur permettant la montée en température.

e - Ce matériau ne devait rien avoir d’exotique et d’incongru à cette époque. Il devait s’agir d’un matériau courant et très bien connu des mouleurs, des potiers ou des staffeurs du 1er siècle. La technique appliquée à ce matériau au moment de la prise devait aussi nécessiter qu’on le couvre de linges pour lui conserver sa chaleur et/ou son humidité.

f - Cette pâte contenait-elle ou était-elle faite à base d’aragonite ? L’aragonite possède-t-elle des qualités particulières ? La présence éventuelle d’aragonite dans le mélange peut-elle renseigner un spécialiste des mortiers antiques sur la technique employée ?

10 - Quelle était la ou les substances à base de sucre déposées à la surface du tissu ? La théorie de Rogers invoquant l’amidonnage des fils de chaîne pour faciliter le tissage suivi d’un lavage imparfait avec de la saponine mal rincée a le mérite de s’appuyer sur une réalité attestée par Pline. Elle a selon moi le défaut de faire, là encore, exclusivement appel au hasard. Même si le faussaire connaissait les propriétés de cette substance de manière empirique, la préméditation de l’opération l’amena très probablement à préparer la toile pour s’assurer de la réussite de l'opération.

On peut sûrement reproduire un phénomène comparable à l’apparition de l’image sur le linceul en utilisant d’autres substances possédant des propriétés équivalentes et, bien que non chimiste (hélas !), je m’y emploie actuellement. Mais l’énigme de cette image ne sera définitivement résolue que quand on aura identifié les véritables substances utilisés à l'époque. L'identification de ces ingrédients nous donnera peut-être aussi une indication sur l'époque.

En guise de conclusion 

L'homme du suaire de Turin est-il "Jésus" en personne ou le faussaire sut-il et eut-il la possibilité au VIè ou au XIVè siècle de "choisir" un homme de type sémite au physique imposant ayant subi une crucifixion en règle pour créer l'image ? Pourquoi un faussaire du VIè siècle aurait-il choisi cet homme qui ne correspondait absolument pas à l'image que ses contemporains se faisaient de Jésus qu'on représentait alors imberbe et avec les cheveux courts ? Où un faussaire du moyen-âge aurait-il pu trouver un crucifié à la mode romaine ? Comment aurait-il su à quel endroit planter les clous et quel fouet utiliser et surtout pourquoi aurait-il lui aussi infligé à son Jésus des traces de sévisses ne correspondant pas à ce que ses contemporains s'attendaient à voir ? Pourquoi ce faussaire du XIVè siécle se serait-il donné tant de mal pour créer une relique aussi parfaite pour un nobliau peu fortuné comme Geoffroy de Charny qui n'en fit rien de son vivant et se contenta de le céder aux chanoines de Lirey ? Je persiste à dire que seul un faussaire du 1er siècle avait non seulement la possibilité mais aussi la motivation pour fabriquer un objet aussi parfait en tout point (si parfait que toute la science du XXè siècle ne réussit jamais à le mettre en défaut). Si on ne parvient pas à percer le mystère du suaire de Turin, c'est qu'on ne l'étudie peut-être pas du bon point de vue. Tant qu'on s'obstinera à le voir comme un faux du XIVè siècle on restera dans l'incapacité de l'expliquer et tant qu'on prêtera attention à ceux qui veulent lui faire prouver la résurrection en s'appuyant sur la "parole d'évangiles", on ne fera qu'enfler la polémique. Autant essayer d'expliquer l'évolution des espèces sans renoncer à sa version biblique comme le font encore certains ! Tâchons un moment d'oublier la vision délirante dont les évangiles nous présentent le monde pour nous fier plus volontiers aux historiens ou au simple bon sens. Le 1er siècle n'a pas connu plus de miracles que notre époque et les écrits de Celse nous montrent qu'au temps évangélique certains hommes pouvaient se montrer tout aussi critiques et pragmatiques qu'aujourd'hui face aux tentatives de manipulation des gourous et de leurs sectes.

Utilisa-t-on le cadavre de Jésus lui-même ou une statue pour produire les amines nécessaires à la réaction de Maillard imaginée par Rogers ? L'emploi direct d'un cadavre reste fort improbable surtout s'il n'était pas celui de Jésus. Qui à cette époque ou au moyen-âge aurait pu connaître et maîtriser une réaction entre les émanations d'un cadavre et les impuretés du linge alors qu'il est encore impossible aujourd'hui d'en donner la moindre explication satisfaisante ? L'utilisation d'un moulage est beaucoup plus plausible et pourrait s'expliquer par une connaissance empirique de cette réaction chimique par rapport à une technique traditionnelle employée par certains artisans. Bien sur, prouver que l'image fut fabriquée avec la technique que je décris à partir des hypothèses de Rogers ne suffira pas à prouver que l'homme du suaire est bien Jésus mais si une nouvelle datation démontre que le linge est bien du 1er siècle, la probabilité qu'il le soit deviendra "presque" aussi grande que dans les savants calculs du Père Paul de Gail.

La question qui reste en suspens à la fin de ce texte et à laquelle chimistes et historiens pourraient apporter une réponse est la suivante :

- Quelle était la technique traditionnelle qui fut utilisée par le faussaire ? Cette technique qui pouvait donner une image d'aspect miraculeux, au modelé étonnamment réaliste pouvant apparaître comme miraculeuse et par conséquent non violatrice des lois iconoclastes Juives ?

Celui ou celle qui saura retrouver cette technique mettra sans doute un point final au mystère de l'image du suaire de Turin ainsi qu'à la question de la résurrection si une nouvelle datation parvient à démontrer l'origine antique du linge.


MC  le 16 juillet 2005         

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